Fatehpur Sikkri : à l’aller, notre bus attaqué, au retour notre bus détourné

Ce matin, quand Gaelle s’est réveillée, elle était toute seule. Elle n’était pas bien du tout mais a émergé quand même vers 11h. Klara était déjà dans la jolie cour de la guest house, à l’ordinateur.  Elle proposait d’aller à pâté-pour-souris (NDLR : Fatehpur Sikkri) car aujourd’hui vendredi, le Taj Mahal est fermé. Comme Gaelle était pas de très bonne humeur, elle a d’abord dit « Moi je m’en fous, j’reste là j’vais végéter ». Et puis Klara a vaqué comme si de rien (mais quand même un peu ennuyée de cette mauvaise humeur), mais finalement Gaelle a changé d’avis assez vite et n’avait pas envie de rester là comme une abrutie, et a fini par dire d’accord. Donc on chope un auto-rickshaw pour aller à la gare des bus, 50 roupies , alors que c’était pas très loin (mais c’est les tarifs d’Agra) . On arrive à la gare des bus, on demande à une première personne qui nous envoie par ici, ce n’est pas par là, puis une deuxième personne qui nous envoie par là mais c’est par ici, bref, comme d’hab’ à la cinq ou sixième personne, on entend le numéro du bus, 2290, on le trouve : c’est un bus pourri de chez pourri (c’est normal on va sur Fatehpurri dit Gaelle qui décidemment finalement est plutôt bout-en-train ce matin),  tout rouillé,  avec à l’avant une caisse métallique genre cantine sous laquelle il y avait soi-disant un moteur, dessous on voyait la route et surtout un levier de vitesse qui n’en est même plus un, c’est une grosse barre de métal  ,qui fait rrrrrh quand il passe les vitesses. Donc le vieux bus pourri démarre. Gaelle a un doute sur le fauteuil du conducteur dont un boulon commence à se dévisser : va-il tomber avec les bosses de la route ? Et Gaelle se retrouver avec le conducteur sur les genoux ?  Le bus est crade, le chauffeur verse de l’eau dans ce qu’on peut imaginer selon nos connaissances somme toute sommaire en mécanique automobile être un radiateur. Au bout d’une bonne vingtaine kilomètres, on arrive au péage. Beaucoup de monde, comme d’habitude . Et donc, c’est le gros bazar, comme d’habitude. Ici en Inde on ne sait pas faire la queue, donc ça arrive de gauche, ça arrive de droite, des tuk-tuks de droite, des voitures de gauche et le bus, bien sûr qui essaye de poursuivre  sa voie.  Mais pour passer au péage, il est obligé de forcer le passage.  Et krhhhhhhhhhhhhhh, notre bus  effleure, enfin suffisamment pour bien rayer du coup l’aile droite et enlever le rétroviseur d’une voiture, qui nous doublait par la gauche. Il faut dire à sa décharge que son rétroviseur gauche, qui ne tenait plus qu’à un fil, s’était décroché et pendait, tout à fait inutile, de côté et que donc ne pouvant voir , le conducteur du bus n’avait rien vu. Ici en Inde, on roule à gauche, donc on double par la droite. Donc a priori la voiture était en tort (mais on connaît pas plus que ça le code de la route indien) .  Alors voyant les dégâts ,  les copains et le conducteur de la voiture n’étaient pas contents du  tout, on peut l’imaginer. Ils sont arrivés en cognant la carroserie et commencent à l’engueuler et on imagine bien ce qu’ils lui on dit : « ouais, t’as vu ce que t’as fait à la voiture, tu crois que tu vas t’en tirer comme ça, etc…etc… ». Ils ont commencé à attraper le conducteur en passant les mains par les fenêtres y compris celles de Klara et Gaelle, juste derrière. Mais Klara a eu le réflexe de pousser les fenêtres coulissantes sur les doigts d’un des assaillants pour lui faire lâcher prise  ….Le conducteur a  alors démarré pour achever de    faire tomber les autres. Il a enlevé tous ses objets de valeur, sa montre, ses liquidités, son portefeuille… et les a confiés à celui qui vendait les billets dans le bus.  Après le péage, comme ils étaient au moins à trois voitures, ils nous ont  rattrapé. Et comme le conducteur avait fermé sa fenêtre, ils se sont saisis de leurs chaussures pour les cogner  contre la vitre , jusqu’à la casser à moitié sur le bras du conducteur, des éclats de verre fusant alors avec fracas dans tout le bus.

Grand moment d’émotion. Le conducteur, sans se démonter, a redémarré, en accélérant pour là encore achever de faire tomber tous ces énervés.

Course poursuite entre le bus pourri et les trois voitures. Puis, à quelques centaines de mètres de la grand’ porte de la citadelle de  Fatehpur Sikkri, les voitures  ont à nouveau bloqué la route, et ses occupants se sont rués à l’intérieur du bus pour se saisir du conducteur, tous les passagers du bus sont descendus et nous aussi. Gaëlle a eu le temps de prendre deux photos. Ils n’en sont pas venus aux mains  mais c’était chaud, la police s’en est aussitôt mêlé et a peut-être bien évité un lynchage.  On a retrouvé notre bus, quelques mètres plus loin, avec des flics autour. Mais pas le chauffeur. On ne sait pas ce qu’il est devenu : hypothèse 1, il est à l’hôpital avec un œil au beurre noir. hypothèse 2, il a des points de suture sur l’avant-bras (c’est tout  à fait possible de s’ouvrir les veines sur un rebord de fenêtre brisée non ?) De nombreuses autres questions subsidiaires se posent  à notre curiosité insatiable de touristes : a-t-il récupéré ses sous ? sa montre ?   était-il ou non un abruti? On s’est rendu compte après coup que les bagnoles, c’était des voitures de l’armée. Peut-être sont-elles prioritaires ? Et nous les passagers, alors ? On aurait pu…en mourir !!!

Bref, alors cette visite de Fatehpur Sikkri ?    D’abord on est rentré par un grand parking style centre commercial et là un,  deux, trois, quatre, dix individus se tenaient à la queue leu leu. Certains ont demandé si on voulait un guide : « Do you want a guide ? ». D’autres : « non mais moi je ne veux pas d’argent…  je veux juste vous accompagner un petit peu et puis après si vous voulez vous pouvez entrer dans mon magasin regarder ce qu’il y a??? »  Le tout pour 100 roupies, d’autres 200, d’autres 300 peut-être, bref, on a  pris un petit bus pour faire les 3km qui nous séparaient du site de Fatehpurr sikkri. Même à l’éntrée du site (on avait payé quand même 260 roupies, c’est pas donné), il y avait une horde de guides qui prétendaient être mieux que tous les Lonely Planet réunis. Un autre   a dit « Non mais je ne suis pas guide, je suis professeur, je veux juste vous montrer le site comme ça » Alors Gaelle a failli lui dire : « you say to me you’re not a guide you’re a professor but you do like the guides, fuck ». Mais on était déjà parties. Bref, après on trouve un site magnifique, grandiose, construit en 25 ans, en pierres rouges virant sur le blanc. C’est l’histoire d’Akbar, le grand empereur moghol, qui se désespérait de ne pas avoir d’enfants et qui avait été en pèlerinage voir un saint soufi, Salim, qui l’a béni en lui prédisant cette naissance attendue pour bientôt .

Ce qu’il advint. En remerciement, l’empereur baptisa son fils Salim, en hommage au Saint, et construisit, à cet emplacement, une vaste cité dont il fit la capitale de son empire mais qui fut mystérieusement désertée à peine 16 ans après avoir été achevée. (ils avaient mis 25 ans à la construire) .


L’empereur dit-on adorait jouer avec ses esclaves. Il jouait à cache-cache (si je te trouve je te décapite),  à plouf-crocodile (si tu tombes dans l’eau, tu te fais manger), à colin-maillard (si tu me touches, je te bouffe) le tout sur des plateaux et des pistes de jeu grandeur nature ..


Gaelle manque encore d’adopter un chien, un petit chiot tout mignon qu’elle nourrit de biscuits achetés en chemin et qui ont déjà été grignotées par les souris (ce qui est presque normal vu le nom du lieu) . Bref, à la sortie, on veut faire un tour dans la ville fantôme mais elle est squattée par des enfants qui nous demandent du shampooing,du chocolat, des roupies… C’est un peu stressant, ici nous on donne des biscuits aux chiens mais les enfants on est obligé de les zapper sinon on ne vient pas en Inde franchement.


Enfin comme il nous restait des biscuits, on leur a donné. Pour le retour, on a hésité entre le dromadaire, la jeep (20 roupies quand on est une quinzaine dedans, 300 roupies quand on est deux), l’auto-rickshaw (à 18-19 personnes dedans, véridique) et le bus. Finalement, on a attendu le bus (27 roupies). Celui là est mieux entretenu, et tout se passe bien… jusqu’au moment où ….le chauffeur tourne à droite alors qu’il fallait rester sur la route principale pour aller à Agra !  7-8 passagers se mettent à gueuler, comme s’ils lui  disaient, « mais qu’est ce que tu fais, c’est pas par ici… »

Et Gaelle aussi, du coup, sur le même ton, en français, s’exerce à la traduction simultanée… Et le chauffeur de leur expliquer quelque chose que nous n’avons toujours pas compris : faisait-il un détour pour  nous faire visiter la campagne, ravissante ? D’ailleurs , on a vu un magnifique soleil couchant , ainsi que des gens et des paons dans les champs, des buffles d’eau (Water buffalo) et des agencements intéressants de bouses de vache  mises à sécher…Sans compter les petits villages typiques au détour desquels des colonnades sculptées augurent la présence d’un temple, les murs colorés et les gens aussi.  Voulait-il éviter le péage ? Avait-il plein de drogue dans ses roues ? Il voulait aller chercher ou déposer des amis plus près de chez eux ? On ne saura jamais, mais nous sommes arrivées à Agra en pleine nuit. (faut dire que la nuit tombe tôt) Et là une vieille dame s’est mise à crier comme une poissonière. Hypothèse 1 : avait-elle raté sa correspondance ? Hypothèse 2 : avait-elle raté sa station sur la route principale ? (ici chacun arrête le bus où il veut pour descendre) Hypothèse 3 : était-elle la belle mère du chauffeur ? Nous n’avons rien solutionné, notre compréhension de l’hindi étant encore assez limitée.  A l’arrivée à Agra, vu qu’on est à l’une des 3 stations de bus de la ville, on se renseigne pour le bus pour Varanasi qu’on doit atteindre demain, et c’est compliqué car ce n’est pas la bonne station de bus pour cette destination. On va ensuite à la gare en se disant qu’on aura plus de chance avec   le train  qui est direct et de nuit, pratique : mais là, surprise, 200 personnes sont déjà sur  liste d’attente en sleeping et on ne veut même pas nous délivrer les billets, en nous disant qu’on risque fort de ne pas pouvoir partir. On cherche tous les trajets possibles, avec les correspondances. Tout est complet.  Un petit jeune sympathique qui ne nous tend pas la main pour qu’on la lui serre, qui ne nous invite pas à boire une bière, qui ne nous demande rien, nous explique le bon tuyau : prendre un General Ticket pour le train de 21 h demain (un ticket général donc, sans réservation, sans rien) , et on va voir le contrôleur, pourqu’il nous trouve une place. Ça nous a coûté seulement 232 roupies à 2 !  à la sortie, on trouve un rickshaw sympathique, qui ne commence pas par nous agresser comme tous ses collègues. Il faut vous dire qu’ici on ne fait pas trois pas sans être sollicité, à la fin de la journée on n’a plus de salive, à force d’avoir dit non, et on n’a une tête comme une citrouille. Et ce rickshaw  nous propose de nous emmener demain faire le tour des sites d’Agra , puis de nous ramener à la gare le soir avec nos sacs.  Donc on accepte. On dîne à l’hôtel et après toutes ces émotions, on va dormir…

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