On a passé la matinée sur le toit de l’hôtel au soleil à rattraper le retard de billets de blog qu’on avait. Et puis, comme à notre habitude maintenant, nous sommes allées boire un tchai chez nos amis, et Klara, ayant renoncé à faire des photos, s’est dit qu’au moins personne ne l’empêcherait de dessiner et donc s’est installée face au burning ghat pour croquer un peu. Et même suffisamment longtemps pour presque en oublier le rendez vous qu’relle avait avec le professeur Mishra.
Une demi-heure au pas de course pour aller à l’autre bout de la ville par les ghats, et… le professeur n’avait pas troqué ses habits de brahmane, il était en train de donner une satsang. Klara a donc écouté patiemment l’enseignement, dans lequel il expliquait grosso modo que rien n’était différent en soi, tout contenant du tout et que donc la saleté et la pollution étaient aussi le tout , donc sur un plan spirituel c’était pas si grave. Son paradoxe entre la science et la religion se resumant au fait que l etre supreme est au dela des limitations de nos cinq sens , so what can we do?
Apparemment, il travaille plus ou moins de mêche avec le gouvernement indien, et c’est donc quasiment impossible probablement de lui poser des questions qui fâcheraient comme : pourquoi le gouvernement a-t-il arrêté le programme de dépollution du Gange entamé en 1992 ? Ou pourquoi le gouvernement n’a toujours pas installé des usines de retraitement de déchets, qui continuent d’être déversés, en pleine ville , directement dans le Gange ? Ou pourquoi aucun programme d’éducation à l’environnement, mis à part le ramassage des sacs et des bouteilles plastiques, n’est fait dans les écoles ? Sans parler des dioxines qu on doit trouver aux abords du Manakarnika ghat, compte tenu de la combustion du bois et des corps… Ajoutons la fatigue du grand age, et peut etre un gatisme naissant (pourquoi avait il fixe rendez vous la veille? peut etre juste pour son enseignement? Hanuman, le dieu singe est un petit malin!).
Klara, un peu dépitée, est repartie le long des ghats faire quelques photos sur le chemin du retour. Pendant ce temps là, Gaelle avait été faire une heure d’internet, quelques courses, du savon , de l’eau de rose, boire un Lassi, pis comme c’était dimanche, beaucoup de magasins étaient fermés. On s’est retrouvé en fin de journée à la petite boutique de tchai. Il y avait aussi le fameux « Owner » (enfin le Big boss du Manikarnika ghat), avec qui Klara avait négocié, accompagnée de Dipoo, l’un de nos petits gars du ghat, le droit de faire 11 mn de photos , moyennant 3000 roupies (une soixantaine d’euros…). Mais au final, Klara avait renoncé, refusant d’alimenter un business macabre sans respect du droit à l’image des familles car sans aucune retombée financière pour eux. Il y avait aussi un flic à la boutique. Klara sort l’appareil et commence à montrer ses portraits à Dipoo, et tout d’un coup le dit -Owner du lieu, un type adipeux au regard torve et à la moustache lubrique, lui fait dire par le tchaiman (le Owner ne parle qu’hindi) qu’il est ok pour l’accompagner gratuitement (« for free ») faire des photos sur le ghat, parce qu’il l’aime bien maintenant. Klara venait de lui expliquer qu’elle ne voulait pas payer parce que de toutes façons elle ne voulait prendre en photo que le feu de Shiva ou des foyers déjà consummés, pas de familles, pas de corps…Il l’accompagne et effectivement elle a une paix royale pour faire les photos (dommage , elle avait pas son pied…). Il insiste pour qu’elle prenne un bout d’os résiduel , un bout de thorax (donc probablement d’un homme, vu qu’il paraît que le thorax brûle pas trop bien chez les hommes, alors que chez les femmes, c’est plutôt les hanches qui ont du mal à se consummer, question de musculation due à la vie de chaque genre). Ce qu elle se refuse a faire, ne sachant ce que pense cet os.
Retour à la boutique. Et là le tchaiman commence à traduire ce que le Owner propose à Klara désormais (et probablement à Gaelle aussi, avec le flic..) : aller boire des bières sur son bateau etc…vous imaginez la suite, pas la peine de faire un dessin. Mais Gaelle a disparu, et Klara se demande dans quel traquenard elle est tombée, s’enquiert de son amie, mais où est-elle, etc… La chienne qui d’habitude vient toujours saluer Gaelle s’approche de Klara et lui accroche le bras avec sa patte, renforçant un peu plus son trouble. De courte durée heureusement, car Gaelle revient alors, elle était juste partie voir la puja, ouf ! Donc Klara décline l’invitation, il insiste un peu, nous avons le même âge, il lui parle de ses femmes de ses enfants, et qu’il aimerait bien être son indian husband. Berk, bref, Klara redécline. Il lui dit cette fois qu’elle peut aller une demi –heure pleine faire des photos, elle lui dit que c’est pas pour autant qu’elle ira avec lui après, il n’en est pas question, il lui dit c’est pas grave, tant pis et la fait accompagner par un des jeunes gars qui travaillent sur le ghat…
Mais celui-ci n’est pas le owner, il a l’air mal à l’aise (ici un touriste s’est fait lyncher il y a trois jours pour avoir pris des photos, les flics sont intervenus, etc…) et s’empresse de nous amener avec Gaelle dans l’ abri au-dessus d’un tas de bois, que squattent nos petits gars. Klara fait deux-trois photos du haut, et Dipoo lui dit d’arrêter, que le owner est vraiment un sale type, un « dirty mind », qu’il pense qu’au cul et qu’il risque de lui faire des problèmes.
Ça confirme ce qu’elle pensait, bien qu’elle ait cru un instant qu’il avait une vraie bouffée de générosité désintéressée, ou un brin de comprehension pour son travail…On passe un petit moment avec eux avant de rentrer dormir. C’est notre dernière nuit à Vanarasi, demain départ pour Khajuraho, par le train de nuit. Une semaine à la campagne, dans un haut lieu de temples tantriques, ça va nous faire du bien…Et Klara va retravailler les photos du feu, pas le temps ce matin…
et vous voila de nouveau sur la route vers de nouvelles aventures.
Ici grisaille et neige à 500m. joie pour les vacanciers., parapluie aux citadins
des bises et encore des bises