Tiwanaku

Sitôt arrivée, on me propose de rejoindre un groupe qui part à Tiwanaku avec une guide aymara. parlant aussi anglais et espagnol. Quel périple! D’abord le minibus arrive avec une demi-heure de retard. Ici, depuis quelques jours, les commerçants protestent contre une interdiction faite par le gouvernement de vendre des vêtements usagés. Ils demandent même un référendum pour cela! Du coup, toutes les rues sont bloquées. Ce qui signifie ici, lorsqu’une voiture tombe sur un blocage, pas grave, elle fait demi-tour. Et le périph devient un gigantesque bazar. Au bout d’un moment je me demande même si nous allons y arriver un jour. Enfin tout finissant par arriver, on y arrive, par la route qui passe par el alto …De toutes façons, avec tout ces déplacements en car, je m’endors systématiquement, donc de là à profiter du paysage!! Le prix d’entrée du site est à la hauteur de sa grandeur (ouh là, Clara commence à écrire bizarre-bizarrement!) : 80 bolivianos (quand le maximum que j’avais payé jusqu’à présent était à la Casa de la Moneda à Potosi (20 Bs). Mais enfin ça vaut le coup. Même si officiellement on ne peut pas prendre de photos. Tout le monde en prenait. Tout est en chantier, en fait. La reconstruction de ce haut lieu spirituel détruit par les espagnols prend du temps et de l’argent.

Le décor? Digne de Tintin et le temple du soleil, vraiment. même si la porte du soleil est en fait toute petite. Et puis elle ne fait même pas partie de ce temple ci, mais du temple de punko punto à 1 petit km du site, c’est un temple dédié au puma. Et la porte a été déplacée.


Ce qu’il y a de plus étonnant, c’est que le site est bâti sur un des points d’acupuncture de la terre, comme à Porquerès, d’ailleurs, en Catalogne. Les chiffres : le 2 pour la dualité, le 3 pour l’équilibre, le 7 pour les points d’énergie (le même nombre que les chakras).
Tiwanaku est construit sur un champ magnétique puissant, les boussoles y perdent totalement le nord. Notamment sur ces 7 portes, dixit la guide toujours. Personne n’ayant de boussoles parmi le groupe, l’affaire ne put être scientifiquement vérifiée. Avec le Mexique (Tihatihuacan) et le Pérou (Cuzco), Tiwanaku forme un alignement parfait dont il est aussi pile au centre. ça oui, on le voit bien sur la carte.
Plein de trouvailles ingénieuses sur ce site, comme par exemple ces pierres creuses en forme d’oreille qui permettent quand on y colle l’oreille d’entendre un murmure qui se dit une vingtaine de mètres plus loin! Un téléphone cellulaire sans batterie? Mais à quoi sert le GSM? à être mis dans la poche peut être?

Ou bien encore ce temple à l’acoustique incroyable dont les briques présentent nombres d’inserts de têtes humaines en pierre.

Et bien entendu ces monolithes, hommes ou femmes qui nous disent qu’on reconnaît à la présence de larmes la capacité à lire le futur.
Comme celui ci, emblématique du site. Un homme de pouvoir qui voit déjà la fin de la civilisation de Tiwanaku.

Les explications de la guide (je précise!) : les habitants de Tiwanaku sont les premiers réfugiés du réchauffement climatique puisque tout le site était planté d’arbres tropicaux, et qu’il y avait de l’eau. C’est ce qui explique que l’on ait pu achever un tel ouvrage, avec des monolithes pouvant atteindre jusqu’à 8m de haut, ou des pierres de construction des temples absolument phénoménales. Les troncs des arbres coupés servaient à les hisser en haut des temples. La déforestation était elle à l’oeuvre?
Le site était habité par des religieux, juste des cellules pour dormir et méditer. quelques pièces pour entreposer vivres et offrandes. Des champions de la biodiversité ces tiwanalotes. à l’époque, toujours selon la guide, on recensait près de 4000 sortes de tubercules contre dix fois moins aujourdh’ui. Chic, j’arrive à dire pomme de terre en aymara. Mais je ne sais pas l’écrire! Et depuis hier j’ai oublié. L’aymara sonne guerrier, guttural, décideur. Certains indiens reprochent à Evo de ne pas bien le parler. La guide murmure du quetchua pour nous montrer la différence. Plus de musique et de douceur, ça me rappelle d’ailleurs mon retour en minibus de Tarabucco avec ce vieil homme presque édenté qui n’arrêtait pas de parler en quechua. Parenthèse fermée.
Pour la symbolique, les femmes se cachent le coeur et le ventre, vie et fertilité, les hommes ont les mains à la hauteur du buste. La main droite se présente à l’envers , pouce vers le haut. Signe d’apparenance à une classe sociale particulièrement élevée…
Le centre du temple principal, celui de la pyramide de ahapana, était taillé en forme de croix des andes. C’était en fait un bassin rempli d’eau qui jouait le rôle d’observatoire astronomique. En effet, plutôt que de se casser le cou à lever la tête pour regarder le ciel, ils en observaient le reflet des étoiles dans l’eau en étant simplement assis tout autour..C’est ce qui a fait la perte de Tiwanaku : les espagnols, voyant ces pratiques ,étaient persuadés que le temple, qui faisait 14 m de haut (7 marches de 2m) était en fait une colline remplie d’or. Ils ont creusé, oui mais, les tiwanakotes avaient en fait construit leur temple avec de gros blocs pour faire les marches et tout l’intérieur en petits gravillons… tout s’est écroulé…A cela on ajoute l’inquisition, où sur le monolithe précédemment montré, les espagnols ont fait graver la croix de l’inquisition, une montagne surmontée d’un soleil surmonté d’une croix, parce qu’ils voulaient en exorciser le mal.
A Tiwanaku, dans le petit musée attenant, c’est surprenant, on trouve des céramiques figurant des chinois, des mongoliens. Selon la guide, ça en laisse long à découvrir sur les probables relations que nourrissait Tiwanaku avec les autres civilisations pré-hispaniques. on découvre aussi qu’ils étaient avancés en médecine puisqu’ils pratiquaient même des interventions . C’était un contexte bizarre puisqu’ on mettait des « anneaux » au crâne des bébés pour allonger la forme de leur tête. Parfois ça donnait à l’âge du jeune adulte des crises d’épilepsie qu’on savait opérer : les crânes du musée attestent de telles interventions. Et de survie post-opératoire (mais à quel taux?). En tout cas, sur les sacrifices, plane toujours le doute, les figurations de sacrifice qu’on trouve sur certaines poteries tiendraient plutôt de ces opérations, dixit la guide toujours.
Les tiwanakotes mesuraient 1m90, vivaient jusqu’à 85 ans, avaient des dents sans carie. Explication : la feuille de coca, anti carie, dixit la guide. Plus la nourriture saine et sans cholestérol. C’est vrai que la collection de crânes dentus est impressionnante. ils sont en plus tous déformés…
Le retour se passe sans encombre, les manifs ont passé. Je passe à l’hôtel récupérer mon sac et file chez Marie-Danielle qui m’a gentiment invitée à finir mon séjour chez elle.

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