Le Gange : en attente d’un miracle ?

Le 31 mai 2011, la Banque Mondiale annonçait le versement d’un milliard de dollars pour la dépollution du Gange. Cette somme, promise depuis fin 2009, est une ultime chance pour tenter de sauver un fleuve en voie d’asphyxie.

Le professeur Mishra, Mahant du Sankat Mochan Mandir, ne se consacre plus qu’aux enseignements spirituels. Le programme de dépollution du Gange qu’il a mis en place? Il n’en parle même plus!

Le Gange est pollué. Le problème n’est pas neuf, certes. Il revient, régulièrement, à la une des actualités, à la faveur des promesses gouvernementales, des aides internationales et des actions des ONG. Mais il est de plus en plus gros. Le fleuve sacré fait aujourd’hui face à une pollution extrême, qui met en péril la biodiversité et la durabilité de son environnement. Le Gange représente 25% de toutes les réserves en eau de l’Inde, qu’il sillonne sur 2525 kilomètres. 400 millions de personnes vivent sur ses rives. Il charrie depuis sa source, au nord-ouest de l’Himalaya, jusqu’au golfe du Bengale, près de 2 milliards de litres d’eaux usées. Nul besoin de grandes études ès microbiologie : eaux souillées rime avec risque pour la santé ! D’autant que le fleuve charrie aussi  carcasses d’animaux et  dépouilles humaines, qui en se décomposant relarguent les bactéries pathogènes contenues dans leurs intestins (des colibacilles fécaux).   Rien d’étonnant à ce que son delta, le plus grand du monde, soit aussi le réservoir mondial historique du choléra. Même si pour la plupart des indiens, le Gange continue d’être sacré, donc propre. Dans ce pays où  « tout est possible » (comme le dit le diction populaire « Sab Kuch Milega »), la foi l’emporte sur la science, et il est bien difficile d’agir. A moins d’être un Mahant (grand prêtre) comme Veer Badhra Mishra, du Sankat Mochan Mandir, le grand temple d’Hanuman à Vanarasi. Lui qui fait ses ablutions rituelles tous les matins dans le Gange depuis  plus de 72 ans, refuse publiquement de boire la traditionnelle gorgée d’eau. «  Il faudrait être aveugle ! » ironise-t-il…en connaissance de cause.

Entre corruption et incompétence

Car en plus d’être prêtre, Veer Badhra Mishra est ingénieur du génie civil et a longtemps été professeur d’hydrologie  à l’Université de Bénarès. Au début des années 1980,  avec des amis, et bien avant que l’on ne parle de programmes gouvernementaux de dépollution, il a monté un laboratoire d’analyse, puis une ONG,  la Sankat Mochan Foundation (SMF) en 1982, afin d’ informer les gens de la réalité de la pollution du fleuve. Il a ainsi montré que la teneur en colibacilles fécaux explosait toutes les normes de salubrité, avec des records prévisibles aux drains de déversement des égoûts de la ville.  Et démarré un  combat pour la réhabilitation du Gange qui a probablement contribué au lancement du  programme gouvernemental de dépollution du fleuve : le GAP (Ganga  Action Plan)  initié en 1986.  Cet ambitieux programme de dépollution, déjà soutenu en son temps par la Banque Mondiale,  intégrait la mise  en place de pompes à déchets aux points de relargage des ordures, des centrales de retraitement des eaux usées, ainsi que l’installation de toilettes publiques et de crematorium électriques. Dans les faits, il semble avoir surtout existé sur papier et servi  à emplir les poches des responsables politiques  chargés de sa mise en œuvre.  De plus, le peu de choses réalisées   ne tenait   même pas compte de deux problèmes majeurs en Inde dans le bassin gangique : la mousson et les coupures électriques. Une solution intelligente, proposée par la SMF et l’Université de Berkeley (USA) consistait-elle par exemple à utiliser la gravité plutôt que l’électricité pour acheminer les eaux usées de Vanarasi à la centrale de retraitement via un ingénieux système de bassins communiquants?  Le gouvernement a préféré financer des modèles tout prêts de centrales fonctionnant  à l’électricité, inopérantes en cas de coupures électriques, et refluant leur contenu directement dans le fleuve en cas d’inondations… ou aux capacités bien trop limitées, à l’exemple de l’usine de retraitement de Kampur, ville réputée pour ses 400 tanneries et le chrome hexavalent qu’elles rejettent, qui n’a qu’une capacité de traitement de 9 millions de litres par jour,  alors qu’un responsable de la centrale lui-même estime le volume d’eau à traiter à 40 millions de litres par jour ! Autre exemple, la création très médiatisée, à Vanarasi,  d’un sanctuaire de tortues entre Raj Ghat et Ramnagar Stretch : les tortues supposées dévorer les restes des cadavres du fleuve ont bien vite été, comme cela pouvait être prévisibles, braconnées par ceux qui sur les rives meurent de faim ! Peu à peu, le GAP s’est délité dans l’absence de fonds pour poursuivre le programme. Tout comme la motivation du Pr. Mishra, ovationné à Rio en 1992, élu homme de la planète par   Time Magazine en 1999, et aujourd’hui quelque peu désabusé : depuis 2003, le site de sa fondation n’est plus tenu à jour ; le tableau  noir accroché à la porte de son laboratoire sur le Tulsi Ghat et censé relayer à la craie les résultats d’analyse de potabilité de l’eau du Gange n’a pas servi depuis longtemps. Parler de pollution du Gange, même, semble l’ennuyer profondément tant il élude poliment les questions. Difficile pour un saint homme de râler contre la bureaucratie indienne ?

La science à l’épreuve de la foi

Sous l’égide de la NGRBA (National Ganga River Bassin Authority) spécialement créé fin 2009, le milliard de dollars promis par la Banque Mondiale pour ce nouveau programme sera-t-il mieux géré ? Dans les faits, cette somme, qu’il aura fallu un an et demi pour débloquer, se répartit entre les deux instances constitutives de la Banque Mondiale :  un don de 200 millions de dollars de l’Association Internationale pour le Développement (IDA)  et un prêt à faible taux d’intérêt  de 800 millions de dollars de la Banque Internationale pour la reconstruction et le développement (IBRD). Un « Centre de Connaissances du Gange » a par ailleurs été créé pour établir un état des lieux, et probablement  aider à constater l’avancement effectif des travaux … Au programme, nettoyage du fleuve et mise en place de programmes de conservation. Comme à Patna par exemple, l’une des villes les plus polluées du fleuve, où un projet de promenade  plantée de 6km de long, vient d’être agréé par la NGRBA. Il n’est pas sûr que ces ambitions largement médiatisées déjoue le « à quoi bon » de tous ceux qui continuent de croire que le Gange est un fleuve sacré que purifie  Shiva  et/ou ne se sentent pas impliqué dans les programmes gouvernementaux  (au cours d’une réunion publique menée fin septembre 2011 à Vanarasi, l’activiste écolo Rajendra Singh  a d’ailleurs dénoncé l’échec de la NGRBA à impliquer la société civile dans les programmes de dépollution   ( article du Times of India du 22/09/2011 ) : tout ici est si fortement empreint  de religieux que le gouvernement n’ose même pas prononcer les mesures élémentaires  de protection des populations … Déclarer l’eau du Gange non potable, voire même interdire aux hindous de s’y baigner ? Impensable au risque de déclencher des émeutes dignes des guerres de religion ! De même, la régulation des crémations qui continuent de se dérouler comme le veut la tradition, à l’air libre… ou de toute autre pratique religieuse telle celle qui consiste à jeter dans le fleuve des couronnes de fleurs bénies par les brahmanes des temples ou   d’y faire flotter de petites bougies  en paraffine (dérivé d’hydrocabures ) …   Sans parler bien sûr du trafic fluvial des bateaux à moteur ! Si l’on peut concevoir que Shiva soit capable de « retraiter » les pêchés des fidèles qui s’y baignent, il est difficile d’admettre qu’il élimine aussi les microbes, les  effluents toxiques des industries pharmaceutiques de Hrishikesh ou des tanneries de Kampur, la dioxine des cendres de tous les bûchers de crémation de Vanarasi, et les divers plastiques, résidus de lessive, et autres détritus qui y plongent. Mark Twain au siècle dernier disait qu’aucun microbe digne de ce nom ne pourrait survivre dans les eaux du Gange : on ne peut pour l’heure que s’étonner de ce qu’il n’y ait pas plus d’épidémies de choléra ! C’est peut-être bien là que l’on  pourrait parler des miracles du Dieu Shiva !

Clara DELPAS

Paru dans Novethic le 30/11/2011

Inde : à la poursuite du diamant vert ?

Novethic   : http://www.novethic.fr/novethic/planete/economie/matieres_premieres/inde_poursuite_diamant_vert/133669.jsp

Sur fond de certification environnementale et de promesses écologiques, la récente réouverture de la mine de diamant de Mahjgawan nargue les lois indiennes et les associations de protection de la nature… en validant les prospections du géant minier américain Rio Tinto.

Dans l’état du Madhya Pradesh (Inde), la mine de Mahjgawan, la plus grande mine de diamant mécanisée d’Asie, a du mal à se refaire une réputation. Sécurisée comme une zone militaire (personne n’y est même autorisé à faire des photos), elle ne manque pas de revendiquer son caractère « eco-friendly ». Des panneaux, écrits et dessinés à la main, sont là pour affirmer que l’écologie est ici une priorité : sur l’un deux, une main porte la planète terre, qui saigne, sur un autre, on peut lire, en anglais, que le personnel du site bénéficie d’un programme d’éducation à l’environnement.  Pourtant, ici, on semble toujours extraire le diamant comme au début du siècle dernier,  en saignant l’unique filon diamantifère à grands coups de dynamite. Les montagnes de cailloux de kimberlite — la roche volcanique qui contient les diamants — sont ensuite ramassées au bulldozer et mises à sécher au soleil pendant plusieurs mois. Puis, on concasse la roche devenue plus friable dans des presses mécaniques, avant de tamiser les poussières de l’ensemble pour en extraire directement les diamants.

Un désastre maquillé de vert

Si l’incidence des diamants est faible (une petite dizaine de carats* pour une centaine de tonnes de kimberlite), les conséquences de leur exploitation sont colossales, à l’image du trou de près d’un demi-kilomètre de diamètre sur plus de 100 m de hauteur creusé par l’extraction minière sur ce site. Au fond du trou, un lac d’une dizaine de mètres de profondeur témoigne que l’on a atteint les ressources souterraines d’eau.

Même si Rajeev Wadhwa, l’ingénieur géologue en chef responsable de la mine, explique que « cette eau vient… du ciel, le trou faisant office de citerne de récupération d’eau de pluie ! » ** ! Pourtant, l’exploitant de la mine, depuis 1995, est… la compagnie minière gouvernementale, la NMDC (National Mineral Development Corporation). Malgré une norme ISO 14001 acquise en 2004 et une communication soucieuse de l’environnement, le Diamond Mining Project n’a pas su faire oublier que la mine se trouvait en plein milieu d’une réserve de tigres, au cœur du parc national de Panna.

Sa certification n’a d’ailleurs pas suffi à duper le bureau de contrôle de la pollution (le Pollution Control Board) : en juillet 2005, la mine a été fermée du jour au lendemain pour non-conformité avec les normes environnementales. Et son illégalité. Car, depuis 2002, une loi indienne interdit les activités minières dans les aires protégées. Un coup dur pour le Diamond Mining Project, soutenu par le ministère de l’Industrie. Temporaire. Les instigateurs du projet ont saisi la Cour Suprême du pays et  fini par la convaincre : la mine a rouvert en août 2009 !

Coudées franches

Au printemps 2011, le site a pourtant des airs d’abandon : le village de mineurs, qui abritait jusqu’à 900 âmes aux temps pleins de l’activité, est désert. Cykim Do, le directeur actuel de la mine, a beau annoncer l’inauguration d’ « une usine ISO 14001, achetée à l’Afrique du Sud, afin de moderniser l’extraction des diamants… » et « qui devrait employer autour de 300 mineurs », le site semble désaffecté, rendant les objectifs de production de la mine, 100 000 carats par an, bien difficiles à atteindre. Les organisations écologiques, atterrées par la réouverture, craignent désormais que la dérogation obtenue ne fasse tâche d’huile, conduisant à un développement minier sans entrave dans les réserves naturelles indiennes… D’autant que la mine de Majhgawan, en activité depuis près d’un siècle, est de moins en moins riche ; l’exploitation d’autres régions du parc, encore recouvertes par la forêt, semble désormais inévitable.

L’an passé, dans le district de Chhatarpur, toujours dans le parc de Panna, à quelque 70 km de là, 13 villages, soit 350 familles, ont été évacués. Comme le rappelle Yusuf Beag, de l’ONG indienne Mines, Minerals and People pour la bonne cause écologique ! Le gouvernement indien s’est chargé de l’évacuation de la zone, et de l’indemnisation des habitants, au motif de « préserver l’habitat naturel des tigres et prévenir la déforestation… ».

Probablement aussi au nom de la joint venture passée avec la compagnie Rio Tinto sur place depuis 2002. Les campagnes de prospection menées par ce géant minier nord-américain américain ont révélé en 2006 des réserves de 27.4 millions carats , soit 7 fois plus que toute la mine de Mahjgawan,  et toujours dans le parc national de Panna !

L’exploitation devrait en démarrer prochainement sous couvert d’une gestion écologique des ressources en eau et en forêt…et de belles promesses de développement économique et d’éducation, soutenues par l’UNICEF. Le Madhya Pradesh, en passe de devenir l’une des dix régions les plus riches en diamants au monde, ne se souciait déjà plus vraiment de ces tigres, dont il ne reste dans tout le parc de Panna que deux femelles et huit petits nés cette année (contre encore une vingtaine  d’adultes dans les années 1990.)… Se souciera-t-il encore demain du sort des habitants expulsés, qui attendent toujours , par ailleurs, leur indemnisation?
* 1carat = 0,2g
**dans cette zone semi-aride arrosée de de 800 mm de précipitations annuelles

Mine de diamant, campagne et fin de parcours n°1

Shivaratri ne dure qu’un jour, après, le manège des racoleurs de shops recommence de plus belle. Au point qu’on les achève à annoner les quelques phrases qu’ils nous ressassent : come to my shop, just have a look, good price, my friend, very old, good quality.  L’un des commerçants en chef a même craqué : en voyant klara, il a même crié  » I don’t want to sell to you anything ». ça tombait bien.  Khajuraho, à part les temples dont le seul nom fait baver ici (ce billet est posté depuis Dehli, quelques jours après…), c’est une belle campagne, côté est peuplée d’enfants qui vous courent après en vous chantant une jolie comptine  » Hello, one photo ? one rupee? money? chocolate? shampoo? schoolpen? « …de l’autre, des enfants qui vous suivent un peu moins racketteur mais tout autant collants… A quelques dizaines de kilomètres de là, se trouve la ville de Panna, avec une réserve naturelle de tigres…en plein milieu de laquelle se trouvent les mines de Meshgawan, des mines…de diamant. Klara a  eu l’autorisation d’aller les visiter, et en a profité pour y emmener Gaelle et Aurélie, que ça intéressait bien sûr. De telles mines ne courent pas le monde et en plus il est rare qu’on puisse les visiter. Seul hic pour le blog, interdiction de prendre des photos. Klara en a quand même volé quelques unes, de l’entrée et du filon de Kimberlite en train de sécher au soleil. Comme elle va en faire un article, elle va pas tout vous raconter ici. Juste pour préciser , les diamants de Meshgawan sont de dimensions tout à fait honorables, en 2010, on en a trouvé un de 34 carats tout de même. On ne les trouve pas affleurant le sol, mais piégés dans la kimberlite, une roche grise concassée dans une usine directement achetée à une mine sud africaine, mais reconvertie en iso 14001, agrément environnemental… Et les géologues de la mine ont gentiment donné à Klara de magnifiques photos de diamants et de la mine, alors après on ne va pas se plaindre; après on a essayé de pister le tigre, il y en a deux par ici, avec huit petits qui viennent de naître. Mais il faisait probablement trop chaud dans ce cagnard. Une mine en plein sanctuaire animal? et oui…

Après, cours de cuisine chez le king du paratha, lhassi et re lhassi, et on rencontre plein de french. On s’arrache un jour plus tôt, pour klara c’est plus sûr car les trains indiens ont des horaires aléatoires voire parfois s’annulent. Klara repart sur Dehli, en train de nuit, avec Aurélie, et Gaelle sur Orcha, en bus de jour. Klara est bien arrivée, pour l’heure dans un petit restau de Paharganj, pour une despedida au ginger lemon. Avec Aurélie. N’a plus trop la pêche pour écrire, ce soir est un peu tristoune, bien acclimatée à la vie locale ici…a changé ses premières impressions sur Dehli.

Gaelle aussi, est bien arrivée à Orcha. C’est la fin du parcours pour moi !

Namasté tout le monde.

 

Shivaratri… réussie!

Même pas une courbature et aujourd’hui est un grand jour : c’est Shivaratri, la grande fête hindoue qui commémore le mariage de Shiva et de Parvathi. Tous les hindous se rendent dans les hauts lieux de pèlerinage, dont fait partie Khajuraho. A Vanarasi, la population passe de 3 millions à 6 millions d’habitants. A Khajuraho, de 20 000 à peut être 40 000 ce qui reste supportable.  Ce qu’il y a de bien dans ces jours de fête, c’est que les temples sont gratuits et nous en profitons donc pour les visiter. Redécouverts au milieu du 19 ème siècle, ils ont choqué le puritanisme ambiant par la crudité des scènes érotiques que jouent les statues des façades extérieures. Et interrogé les explications… Une version légendaire rapporte que Hemavati, une jeune brahmane, alors qu’elle se baignait un soir nue dans la rivière, a été séduite par le Dieu lune. De cette union  est né un fils Chandravarman. La fille mère, bannie de la société , s’est réfugiée dans la forêt où elle a élevé son fils en mère et gourou. Le garçon   devenu   homme   a donné vie aux premiers Chandela, une dynastie royale d’’origine rajpoute mais de descendance lunaire (habituellement les rajpoutes descendent du soleil), et qui a connu son apogée à la fin du 1er millénaire… Une nuit, Chandravarman a vu en songe sa mère l’implorer de bâtir des temples qui révèleraient les passions humaines et les frustrations  de la population !

Et donc nous voyons des temples, des temples et encore des temples, dans un grand parc bien entretenu , bien vert et fleuri.  Bien sûr tout le monde est là pour voir ces fameuses sculptures du Kama-Sutra, on voit bien où les gens s’arrêtent : toujours aux mêmes endroits. Comme certaines images risqueraient de heurter la sensibilité des plus jeunes, nous ne vous en mettrons pas de trop compromettantes.  Juste deux statues qui se roulent un palot. 😉

 

Depuis le parc aux temples, on a une vue de premier choix sur le temple de shiva où c’est  une activité intense, avec des groupes d’hommes et de femmes (séparés) s’agglutinant à l’entrée, puis se précipitant pour gravir les marches du temple , un godet d’eau à la main…

A l’occasion de shivaratri, c’est jour de foire et de marché, on en profite pour faire pour faire quelques boutiques. Et puis le soir, on a la chance d’accompagner la processon de shiva allant à son mariage, avec la fanfare des dieux et des déesses, Kali, Brahma, Lakshmi, etc…. et pour finir d’assister au spectacle offert par l’hôtel Lalit, un hôtel de luxe pour millardaires puisque la chambre est à 2000 euros, ça vous laisse imaginer le standing…. Et on en a vu, des riches, dans la procession avec des saris brodés de diamant et des chaussures incrustées de pierres précieuses.

Quel contraste avec la plèbe, les rickshaws étaient gentiment invités à se ranger sur le côté pour ne pas être dans le champ des caméras. Une bonne partie des télévisions de l’Inde étaient là, prenant des photos d’une star de Bollywood et pour finir, on a eu des places assises pour le spectacle rejouant donc le mariage de shiva et de parvathi. Et tout ça grâce à Ibrahim, qui tient dans ses mains un sacré pouvoir, c’est un VIP qui connait tout le monde, et c’est pour ça qu’on a été dans le carré des VIP . Alors le spectacle c’était de la danse , avec de jolis costumes, et un en arrière plan les temples de Khajuraho, et de belles lumières, et de la bonne musique. L’histoire est archi simple, Shiva arrive, Parvathi arrive, ils ne sont jamais vus, on les réunit pour le mariage , ils se découvrent et chacun danse de joie à son tour, puis les dieux et les déesses font la farandole en signe d’alégresse.

Après, un discours de la propriétaire de l’hotel  Lalit, qui offre ce spectacle tous les ans à la population, avec un repas gratuit à la sortie. On a évité le gratuit, c’était dangereux, on voyait les policiers avec des bâtons   réglementer la circulation autour du buffet et taper sur ceux qui  se marchaient les uns sur les autres pour arriver les premiers au buffet ;  Ensuite, on a été au temple à Shiva, pour faire quelques offrandes pour la famille et les amis (vous en avez de la chance, hein ?).

Au pied du temple, nous avons acheté nos offrandes, des sucreries, une noix de coco et de l’encens. Puis, on a fait un petit rituel autour de la statue de Ganesh , le fils de Shiva et de Parvathi , (planté l’encens et casser la noix de coco) et nous sommes monté au temple , où nous avons jeté nos offrandes sur le lingam géant qui se trouve en son centre (le plus grand qu’on ait jamais vu en inde !) .

Et puis pour une fois qu’on voit un peu de femmes :

Au pied du temple de shiva, les éclopés de la ville, mendiants paralytiques veillards aveugles enfants des rues, chantent et font la manche.  Pour achever  la noce, on a été boire des bières chez l’italien, faut vous  dire qu’en temps de shivaratri, la vente d’alcool est interdite, parce qu’un hindou qui boit devient généralement violent et que personne veut de bazar ici. On a bu à la santé de shiva, qui était rappelons le quand même un sacré noceur, en mangeant des pakoras de toutes sortes (fromage, œuf, légumes…) et des finger chips (le nom indien pour les frites).

 

Khajuraho, vélo et pas photo

Cette nuit nous avons voyagé dans un train avec un wagon special touriste, et dans ce wagon des russes aussi insupportables que les hindous, parlant fort, en rigolant grassement ; nous sommes arrivées avec deux heures de retard, nous avons posé nos sacs à la yogi lodge, qui apparemment n’est plus ce qu’elle était, le yogi qui la tenait étant mort l’année dernière et ayant passé l’affaire à ses fils qui n’ont pas les mêmes engagements spirituels. Enfin, c’est pas cher, et on a réservé pour la semaine. Au petit dej, on rencontre Aurélie,  une française de Toulon, et nous voilà parties pour un raid en vélo et en plein cagnard. Destination, les chutes de Rajah, à une vingtaine de kilomètres de là. Comme ici on n’est en hiver, tout est à sec et quand nous sommes arrivées aux dites chutes, qui se trouvent dans une réserve payante, on a eu l’impression de se faire arnaquer : il n’y avait pas d’eau sur les grandes gorges de roches découpées, magnifiques. On y a croisé des guides du parc vêtus de kaki et équipés de moto  qui nous proposaient une heure de balade avec eux dans la jungle pour voir les animaux (crocodile,antilope, léopard, …et tigre !)  moyennant 300 roupies chacune. « Trop cher pour peut-être voir de loin un  hindou dans la peau d’un crocodile ! » commente Aurélie.  Nous déclinons et …Devons refaire  la route dans l’autre sens. 28 km en fait, en comptant tous les kilomètres dans la réserve. Un peu épuisées par cette aventure, on finit chez le roi du paratha, selon Aurélie toujours, qui est là depuis plusieurs jours . Un peu gras quand même, nos paratha aux patates et au fromage.

 

Mais de quel bois se chauffe donc Shiva?

On a passé la matinée sur le toit de l’hôtel au soleil à rattraper le retard de billets de blog qu’on avait. Et puis, comme à notre habitude maintenant, nous sommes allées  boire un tchai chez nos amis, et Klara, ayant renoncé à faire des photos, s’est dit qu’au moins personne ne l’empêcherait de dessiner et donc s’est installée face au burning ghat pour croquer un peu. Et même suffisamment longtemps pour presque en oublier le rendez vous qu’relle avait avec le professeur Mishra.

Une demi-heure au pas de course pour aller à l’autre bout de la ville par les ghats, et… le professeur n’avait pas troqué ses habits de brahmane, il était en train de donner une satsang. Klara a donc écouté patiemment l’enseignement, dans lequel il expliquait grosso modo que rien n’était différent en soi, tout contenant du tout et que donc la saleté et la pollution étaient aussi le tout , donc sur un plan spirituel c’était pas si grave. Son paradoxe entre la science et la religion se resumant au fait que l etre supreme est au dela des limitations de nos cinq sens , so what can we do?

Apparemment, il travaille plus ou moins de mêche avec le gouvernement indien, et c’est donc quasiment impossible probablement de lui poser des questions qui fâcheraient comme : pourquoi le gouvernement a-t-il arrêté le programme de dépollution du Gange entamé en 1992 ? Ou pourquoi le gouvernement n’a toujours pas installé des usines de retraitement de déchets, qui continuent d’être déversés, en pleine ville , directement dans le Gange ? Ou pourquoi aucun programme d’éducation à l’environnement, mis à part le ramassage des sacs et des bouteilles plastiques, n’est fait dans les écoles ?  Sans parler des dioxines qu on doit trouver aux abords du Manakarnika ghat, compte tenu de la combustion du bois et des corps… Ajoutons la fatigue du grand age, et peut etre un gatisme naissant (pourquoi  avait il fixe rendez vous la veille? peut etre juste pour son enseignement? Hanuman, le dieu singe est un petit malin!).

Klara, un peu dépitée, est repartie le long des ghats faire quelques photos sur  le chemin du retour. Pendant ce temps là, Gaelle avait été  faire une heure d’internet, quelques courses, du savon , de l’eau de rose,  boire un Lassi, pis comme c’était dimanche, beaucoup de magasins étaient fermés. On s’est retrouvé en fin de journée à la petite boutique de tchai. Il y avait aussi le fameux « Owner » (enfin le Big boss du Manikarnika ghat), avec qui Klara avait négocié, accompagnée de Dipoo, l’un de nos petits gars du ghat, le droit de faire 11 mn de photos , moyennant 3000 roupies (une soixantaine d’euros…). Mais au final, Klara avait renoncé, refusant d’alimenter un business macabre sans respect du droit à l’image des familles car sans aucune retombée financière pour eux. Il y avait aussi un flic à la boutique. Klara sort l’appareil et commence à montrer ses portraits à Dipoo, et tout d’un coup le dit -Owner du lieu, un type adipeux au regard torve et à la moustache lubrique, lui fait dire par le tchaiman (le Owner ne parle qu’hindi) qu’il est ok pour l’accompagner gratuitement (« for free ») faire des photos sur le ghat, parce qu’il l’aime bien maintenant. Klara venait de lui expliquer qu’elle ne voulait pas payer parce que de toutes façons elle ne voulait prendre en photo que le feu de Shiva ou des foyers déjà consummés, pas de familles, pas de corps…Il l’accompagne et effectivement elle a  une paix royale pour faire les photos (dommage , elle avait pas son pied…). Il insiste pour qu’elle  prenne un bout d’os résiduel , un bout de thorax (donc probablement d’un homme, vu qu’il paraît que le thorax brûle pas trop bien chez les hommes, alors que chez les femmes, c’est plutôt les hanches qui ont du mal à se consummer, question de musculation due à la vie de chaque genre). Ce qu elle se refuse a faire, ne sachant ce que pense cet os.

Retour à la boutique. Et là le tchaiman commence à traduire ce que le Owner   propose à Klara désormais (et probablement à Gaelle aussi, avec le flic..) : aller boire des bières sur son bateau etc…vous imaginez la suite, pas la peine de faire un dessin.  Mais Gaelle a disparu, et Klara se demande dans quel traquenard elle est tombée, s’enquiert de son amie, mais où est-elle, etc… La chienne qui d’habitude vient toujours saluer Gaelle s’approche de Klara et lui accroche le bras avec sa patte, renforçant un peu plus son trouble. De courte durée heureusement, car Gaelle revient alors, elle était juste  partie voir la puja, ouf ! Donc Klara décline l’invitation, il insiste un peu, nous avons le même âge, il lui parle de ses femmes de ses enfants, et qu’il aimerait bien être son indian husband. Berk, bref, Klara redécline. Il lui dit cette fois qu’elle peut aller une demi –heure pleine faire des photos, elle lui dit que c’est pas pour autant qu’elle ira avec lui après, il n’en est pas question, il lui dit c’est pas grave, tant pis et la fait accompagner par un des jeunes gars qui travaillent sur le ghat…

Mais celui-ci n’est pas le owner, il a l’air mal à l’aise (ici un touriste s’est fait lyncher il y a trois jours pour avoir pris des photos, les flics sont intervenus, etc…) et s’empresse de nous amener avec Gaelle dans l’ abri au-dessus d’un tas de bois,  que squattent nos  petits gars. Klara fait deux-trois photos du haut, et Dipoo lui dit d’arrêter, que le owner est vraiment un sale type, un « dirty mind », qu’il pense qu’au cul et qu’il  risque de lui faire des problèmes.

Ça confirme ce qu’elle pensait, bien qu’elle ait cru un instant qu’il avait une vraie bouffée de générosité désintéressée, ou un brin de comprehension pour son travail…On passe un petit moment avec eux  avant de rentrer dormir. C’est notre dernière nuit à Vanarasi, demain départ pour Khajuraho, par le train de nuit. Une semaine à la campagne, dans un haut lieu de temples tantriques,  ça va nous faire du bien…Et Klara va retravailler les photos du feu, pas le temps ce matin…

Ce feu a ete allume par Shiva lui meme voici plus de 5000 ans, et ne s est jamais eteint. Un gourou rasta s est installe la en 2008. On le devine derriere les tridents. Un jour de mousson, il a trouve dans le temple un bebe elephant, faisant la une des journaux...

Varanasi : on chauffe toujours!

Ce matin, Klara allait interviewer le professeur Mishra. En chemin, elle est passée aux bureaux de la relation clientèle d’Airtel. Un vendeur analphabète du Chowk  nous a refourgué une recharge Airtel qui ne permet de passer que des appels en local (c’est-à-dire à Dehli, puisque nous avons acheté la puce à Dehli). Bref, on s’en fout vu qu’on ne reviendra pas à Dehli …100 roupies pour le rickshaw, qui a du pédaler dur dans la chaleur et loin pour aller à Lanka, un peu en dehors de Vanarasi. Et une bonne demi heure de palabres avec les employés pour qu’on recrédite notre compte en national. Tout ça pour une recharge de …100 roupies. Bon, ça vaut pas tripette d’accord mais c’est pour le principe. Klara a vu le professeur Mishra qui était ce matin dans ses habits de brahmane et lui  a dit avoir plein de choses à faire pour le temple , préférant donc lui consacrer du temps le lendemain après midi. Klara et Gaelle s’étaient donné rendez vous à mi-route, au  Dashashwamedh ghat, là où il y a des grands portraits de Satya Sai Baba.. On a flâné sur la Madanpura Road, où on a vu des embouteillages monstrueux, y compris piéton, impossible de faire un pas, vous n’imaginez même pas. (les photos ne rendent pas) . Klara avait oublié ses lunettes de soleil à l’hôtel et c’est la dernière fois qu’elle les oublie parce que la pollution et la poussière et le soleil attaquent grave les lentilles, elle y voyait plus rien, impression d’être dans le fog. Du coup, arrêt dans un espace vert pour avoir un peu d’oxygène, et Klara retrouve la vue.  Notre objectif de l’après midi : l’ashram de Mata Aanandmai au ghat du même nom. Moment paisible, accompagné d’ un vieil homme édenté (et oui, ça manque de dentiste à Varanasi) et tout tranquille , nous expliquant tout….mais en hindi.

Puis, à la sortie, au temple de Ma, devant les trois statues dorées qui la représentent aux 3 âges importants de sa vie de maître (jeune femme, femme et vieille femme), en plein recueillement méditatif,  séquence prise de tête avec un boatman qui nous demandait 300 Roupies pour nous ramener au Scyndhia Ghat, à  l’hôtel …Ah là là, le  silence est dur à obtenir…retour en partie à pied, en partie en bateau. Gaelle avisée a toujours sa bombe de repellent à moustiques dans son sac (parce que sur le bateau à la tombée du jour, c’est quelque chose !) . Comme tous les  soirs maintenant, on a dîné à l’hôtel et on est ressorti boire un tchai avec nos bad boys. Sur le trajet du retour, nous nous sommes arrêtées devant les crémations, mais à l’entrée du temple à Shiva cette fois. Nous avons rencontré trois touristes espagnols qui ont eu la bonne idée d’aller parler au prêtre du temple qui nous semblait bien blanc pour un hindou. Effectivement,c’est un british, avec les dreads et la barbe longue, plutôt jeune et très sympathique. Il explique que son gourou l’a installé ici voici 12 ans. Il est architecte ou presque, il est en train d’écrire son doctorat à l’université du Kansas. Il est sûrement d’un milieu très aisé car il nous parle d’une propriété familiale qu’il occupe une partie de l’année à Almeiria en Espagne. Nous sommes ensuite  invités avec les touristes espagnols à boire un tchai, chauffé au feu de Shiva, dans le temple, avec le gourou, le prêtre british , et les musiciens qui partent dans une rythmique impressionnante sur les chants votifs habituels à Shiva. Le gourou est un homme moderne, il a des lunettes et un téléphone portable mais son look est plutôt celui d’un homme préhistorique. Il est très maigre, ressemble plutôt à un rasta qu’à un hindou. Nous allons continuer à mener l’enquête. En sortant du temple, il nous a passé trois doigts de cendres de Shiva sur le front. Et nous sommes tous rentrés, un peu en retard mais comme on était groupés, le veilleur de nuit n’a trop rien dit… et avons tous dormi d’un sommeil extraordinaire (Klara sinon était réveillée tous les jours autour de 4h30, 5h du mat, à cause du bordel sonore ambiant).

Les ghats, de l’autre côté


Ce matin, on est remonté vers l’ouest, des ghats qu’on n’avait pas encore visité. On a été tout au bout, jusqu’au pont, le Malviya Bridge, tout en métal, un double pont, avec sur le niveau 1 les trains, et sur le niveau 2 , les voitures. Au Raj Ghat, on a vu les bâteaux chargeant le bois des crémations, et là, pas d’interdit pour faire des photos ….

Ces ghats là nous ont semblé moins fréquentés des touristes, plus sales avec des buffles d’eau de partout et les bouses qui vont avec, des troupeaux de chèvre,et surtout deux gros drains d’ordures de la ville se déversant directement dans le Gange. Nous avons    ensuite trouvé un parc, dans lequel Klara pensait trouver le service des eaux de Vanarasi, induite en erreur par une pancarte, et qui s’est avéré être un parc archéologique, avec une présentation des ruines du Raj Ghat dont certaines remontaient à – 800 avant J.C, et qui montrent l’évolution de l’aménagement urbain le long des ghats.  Gaelle est restée faire une sieste, Klara est partie visiter le temple de Vishnou, là encore un temple très ancien puisque Vishnou lui-même y aurait posé ses fameux pieds, juste à la confluence de la rivière Varuna et du Gange. Comme elle avait toujours dans l’idée de trouver ce fameux service des eaux, elle est rentrée dans ce qui avait l’air d’être une administration gardée des militaires et s’est retrouvée  à la Bhagant School de la Fondation Krishnamurti, dans les bureaux du directeur, qui l’a aidée à trouver la bonne personne pour parler de la pollution du Gange et de la politique d’assainissement de la ville : le brahmane du Sankat Mochan Temple, qui est aussi biologiste et a monté un laboratoire d’analyse des eaux au Tulsidas ghat. Klara est toute contente et part visiter le temple de Vishnou, en pleine puja, se fait réclamer des bakchichs par une vieille femme édentée à l’extérieur du temple, et…finit par se dépêcher de retrouver Gaelle, qui commençait à trouver le temps long . On est rentré, encore une fois par les ghats, en se prenant une averse. Un boatman boîteux en béquilles qui ne pouvait vraiment que ramer de ses petits bras, nous a proposé l’abri dans sa petite cahutte, quelques planches de bois assemblées en un cube pouvant se fermer et se verrouiller à l’avant, entre le truc de bouquiniste parisien (sans les livres évidemment) et la cabane de pêcheur, la fenêtre et la porte en moins …Nous étions un peu gênées de cette générosité spontanée, lui se retrouvant du coup presque sous la pluie. On a été à Assi Ghat, manger une pizza, parce que c’était juste à côté de Tulsi Ghat où Klara voulait voir le Brahmane, mais le labo était fermé. Gaelle est rentrée par les ghats, sous la pluie, au milieu des éclairs et des orages. Elle s’est abritée…sous l’auvent  où étaient stockés les corps en attente d’être brûlés (mais elle ne le savait pas avant d’y être et personne ne  l’a empêché d’y aller, d’ailleurs il y avait aussi d’autres étrangers…). Klara s’est abritée dans un cyber café, à documenter ces histoires de suivi de la pollution du  Gange.  Elle a notamment découvert que le gouvernement indien ne faisait vraiment pas grand-chose pour assainir l’endroit. Le professeur qu’elle doit interviewer dimanche , se bat depuis 1982 pour qu’un système de récupération des déchets et de retraitement des eaux usées soit installé. Sa fondation a notamment établi qu’aux points de déchargement des ordures , les concentrations en coliformes fécaux (des ‘crobes qu’on trouve dans le caca et qui donnent des diarrhées, pouvant aller jusqu’au choléra…) atteignent des chiffres astronomiques, de l’ordre de la cinquantaine de milliards d’unités au ml. Alors que la norme maximale tolérée fixée par l’OMS pour la baignade est de 500 U./ml , et pour la potabilité, de 0 U./ml…Mais ce n’est pas la préoccupation principale des politiques, même si, tous les ans au moment de la mousson, des  épidémies de choléra déciment les populations. Etonnant de voir comment les politiques netouchent pas aux aspects religieux de la culture indienne : le fleuve sacré est toujours réputé capable de résorber toute sa pollution par la seule intervention de Shiva… Comme la veille (on commence à avoir nos petites habitudes), on a dîné à l’hôtel et pis on est ressortie sur le manakarnika ghat. Klara avait eu moyennant bakchich autorisation de faire des photos , sous protection bien évidemment, mais, à la réflexion, ne voulant pas alimenter ce buiseness morbide à la Paris Match, et parce qu’il suffit d’aller sur Wikipedia (quelle bonne idée que cet espace d’échanges où tout est gratuit et libre de droit) pour trouver des photos trash des crémations, elle a décliné. Et du coup, comme tout le monde était prévenu dans le ghat, les gens ont commencé à nous parler pour nous proposer leurs propres buiseness, le vendeur d’eau minérale par exemple a une jolie collection de photos qu’il propose à la vente comme carte postale ou presque. Enfin , berk, ça ne nous viendrait pas à l’idée de vous envoyer ça. Non, par contre, Klara rêve toujours de poser son pied devant le feu de Shiva, le bois, le petit temple en haut, et tout ça de nuit, quand on ne voit plus rien d’autres que les mouvements des ombres et la lumière des flammes…

Sarnath

Après le Népal, le Tibet aujourd’hui, on a été à Sarnath, le lieu de pèlerinage bouddhiste , où le bouddha a proféré son premier sermon, le « Maha-Dharma-chakra Pravartan »   juste après avoir connu l’éveil. Sarnath est au bouddhisme ce que Vanarasi est à l’hindouisme, et comme ce n’est qu’à 10 km de distance on a fait d’une pierre deux coups. La route pour y aller : chaotique et fréquentée, avec des nuages de sable et de poussière qui rendent le foulard obligatoire pour respirer. Le temps : chaud, et plein soleil,  tendance orage. Visite éclair, écrasée par la chaleur. Nous avons démissionné des objectifs touristiques pour méditer dans le parc à l’ombre .

Avec nous, quelques moines en robe rouge, de nombreux pélerins tout vêtus de blanc, des tibétains en civil, des biches , des chiens, des petits oiseaux et de petits enfants   qui vendent des carottes coupées par leurs mères pour nourrir les biches,  au milieu des ruines de briques rouges, fondations et début de mur excavés où on imagine des dizaine de monastères , jadis, au temps du bouddha.

Nous avons été ensuite visiter le temple tibétain, avec de grandes photos du Dalaï-lama (qui est venu là il y a une quinzaine de jours à peine), et une statue en or énorme du bouddha.

Puis, visite du temple japonais, avec un bouddha en bois allongé cette fois, et beaucoup d’objets , des tentures, des peintures, des cloches, de l’écriture… Nous n’avons pas été jusqu’au temple chinois , sûrement Chan, ni au temple  thailandais, dont on a  juste pu en partant apercevoir la gigantesque statue du bouddha , debout cette fois, et selon la vue aiguisée de Gaelle, en rénovation probablement.  En chemin vers le temple tibétain au bord de la route, dans l’entrebaillement d’une petite maison ouverte, aux murs peints de bleu, Klara aperçoit un corps recouvert d’un linceul blanc allongé sur un lit ressemblant à un lit d’hôpital (d’ailleurs c’était à la sortie de l’hôpital) , avec au chevet un vieil homme se recueillant. À l’extérieur, une grande corbeille en osier avec de l’encens, les perches de bambou pour le brancard funèbre et ces tissus métallisés orange, rose, rouge, jaune, blanc, or, argent, prêts à recouvrir le corps , en partance pour la crémation. Le rickshaw ne nous a pas déposé là où on voulait, on a déambulé les rues, flânant jusqu’à notre hôtel où nous avons dîné pour ne pas nous laisser prendre par le temps. On est ressorti voir nos  amis de la petite boutique de tchai, continuant d’étudier la jeunesse du manikarnika ghat de Vanarasi.

Népalais …beau, quoi !

Aujourd’hui on est parti à Kathmandou, au Népal. Si si, on vous assure. Sur le ghat voisin du Manakarnika Ghat, le Lalita Ghat, se trouve un temple réplique d’un temple de Pashupatinath (également lieu de crémation au Népal, sur une rivière qui se jette dans le Gange) , construit par le roi du Népal au 19 ème  siècle, avec des bois sculptés de figures érotiques à faire rougir les vieilles rombières surmontant des sculptures très fines de yoginis ou de déesses.  Klara a vraiment trouvé cela drôle de revoir ce mélange de briques rouges  et de bois foncé.
L’intérieur du temple contenait un shivalingam surmonté d’un cobra et entouré de fleurs, mais aussi un calendrier et une horloge ( !).  Gaelle a commencé à se renseigner au centre d’informations touristiques népalais installé dans le centre sur les possibilités d’aller au Népal sur la fin de son séjour.

Puis, comme elle aime la couleur rose , et qu’il y avait un marchand ambulant de barbapapa sous plastique qui s’annonçait en disant « barbapapabarbapapa… » en hindi, et qu’il suffisait d’hêler pour le faire venir, elle a acheté de la barbapapa indienne (mais c’était pas bon alors elle l’a refourgué aux enfants népalais qui n’en voulaient pas non plus d’ailleurs…). Nous avons fait un tour en ville dans les rues car il faisait trop chaud sur le ghat. Nos bad boys nous proposaient une virée en bateau pour aller se baigner dans le Gange, mais bon on n’est pas encore prête.  Il paraît qu’il faut d’abord se débarasser de toutes les pensées négatives qu’on peut avoir sur le Gange (c’est sale, y a des cadavres qui flottent, les égouts de la ville s’y déversent, les gens s’y lavent , y lavent leurs linges, les bateaux à moteur polluent, les vaches et les chiens s’y baignent, y a des fleurs qui y pourissent de partout, etc..etc…).

Le soir, puja au Gange avec photos de nuit.

Puis, portraits à la boutique de tchai habituelle, , et là même dos au  Manakarnika Ghat, on entendait « no photos, no photos ». Et pas mal de monde est venu autour de nous voir ce qu’on foutait avec l’appareil photo.

 

 

 

 

On a traîné, ratant l’heure limite pour dîner à notre hôtel, qui nous a envoyé en ville, dans un restau recommandé par les guides du routard, etc..(le Fuji Restaurant) mais franchement mauvais : Gaelle a eu droit à une mixture décongelée de légumes au curry, c’était spécial, après avoir eu le Paleer panak (épinard au fromage) le plus mirtchi qu’on est jamais mangé ici. (Gaelle croit même d’ailleurs que les cuisiniers maintenant se vengent des touristes qui demandent de la nourriture pas épicée…)