Les maladies des nouveaux animaux de compagnie

Avoir un chien  ou un chat ? Pas très original ! Certains préfèrent porter un rat sur l’épaule ou un serpent autour du cou ! D’autres adoptent des mygales, des  furets, des singes …de quoi satisfaire les besoins de compagnie les plus exotiques! Depuis les années 1970  les  NAC  ( Nouveaux Animaux de Compagnie) connaissent un vif engouement. Mais au-delà de la mode, on oublie souvent qu’ils sont des vecteurs parfois forts dangereux de maladies !

Surnommés NAC au début des années 80 par le vétérinaire lyonnais, Michel Bellangeon,. des animaux, souvent sauvages, ont commencé à être adoptés comme animaux de compagnie. Aujourd’hui, 5% des français possèderait les quelques 18 millions spécimens estimés. Parmi ces nouveaux compagnons, on recense des animaux exotiques (tels que des perroquets, mainates et autres oiseaux, des reptiles, comme des iguanes ou des serpents…), mais aussi, plus classiques tels ces petits rongeurs que l’on trouve fréquemment jusque dans les salles de classe (cobayes, hamster…) ou plus insolites (mouches, araignées, escargots ou vers à soie). Comme le rappelle François Moutou, épidémiologiste à l’AFSSA et président de  la Société Française pour l’Etude et la Protection des Mammifères  (SFEPM), « Pour que ces animaux soient vendus, ils doivent être sains. Or les animaux voyagent avec leurs maladies, et surtout, avec les agents de celles-ci, et ce d’autant plus facilement qu’on ne les connaît pas ou bien mal ». Car, pour l’essentiel des espèces,   la durée d’incubation de nombreuses maladies reste inconnue :  ces maladies peuvent donc se déclencher après l’acquisition de l’animal. Et certaines d’entre elles sont transmissibles à l’homme. Ces « zoonoses » (du grec zôon, « animal » et nosos, « maladie ») peuvent être, comme toutes les maladies, apportées par des bactéries, par des virus ou par des parasites. « Il est assez surprenant de réaliser que certains des germes craints par les services de santé et de sécurité de quelques grands pays voyagent plutôt librement à travers les continents grâce au commerce florissant des animaux de compagnie exotiques ! » s’exclame François Moutou.

Le grand retour de la peste et de la rage ?

Maladie bactérienne des rongeurs désertiques, la peste a tenu le rôle principal dans les funestes chroniques de l’Europe du moyen âge. Mais on la trouve toujours  aujourd’hui en Asie, en Afrique ou en Amérique où elle sévit régulièrement, notamment depuis 2000 chez  les chiens de prairie à queue noire (Cynomys luduvicianus). Or ces animaux si mignons ont eu une place belle parmi les NAC.  Capturés dans la nature, ils ont eu l’occasion de donner à quelque uns de leurs (mal)heureux propriétaires quelques   puces infectées vectrices de pestes buboniques! Pas en Europe, heureusement, qui les a  interdit en 2003.  C’était d’ailleurs pour une autre raison, mais pas des moindres ! En effet, les chiens de prairie, à la suite de contacts rapprochés en animalerie avec des rats de Gambie, se sont mis à être atteints d’une forme de variole spécifique à l’Afrique , la variole du singe. L’interdiction a fait suite à une épidémie de Monkeypox qui a eu lieu aux Etats Unis en juin 2003 et fait 72 victimes !

Autre maladie  très étroitement surveillée : la rage.  Alors qu’on la pensait disparue depuis 1998 de notre territoire, des importations d’animaux  l’ont faite ressurgir en 2003. Bien sûr, on pense aux chiens, mais saviez-vous qu’en Belgique, une chauve-souris acquise en animalerie en 1999 s’est avérée être atteinte de rage ? Même si on peut s’étonner d’adopter une chauve-souris comme animal de compagnie,  la prudence s’impose !  Car bien d’autres maladies sont susceptibles d’être données par nombre de ces « nouveaux » animaux de compagnie !

 « Pourquoi acheter des produits alimentaires en détaillant l’étiquette et un animal vivant sans se poser de question ? »  ironise François Moutou. Se demande-t-on seulement par exemple dans quelles eaux voyagent les poissons  exotiques de nos aquariums?

 

Rongeurs : virus, bactéries et dermatoses

On connaît la chanson : « Il court il court le furet ». Au point qu’aujourd’hui tout furet (mustella putorius fero), circulant dans l’union européenne doit être identifié par une puce ou un tatouage et vacciné contre la rage. Normal ,  on le trouve en vente dans les animaleries, prêt à loger dans nos maisons. Certes, il est  domestiqué depuis 5000 ans, étant élevé traditionnellement pour sa fourrure et pour la chasse aux lapins . Mais  ce n’est qu’il y a peu qu’il  a gagné le statut de NAC. Il est d’ailleurs devenu aux Etats-Unis  le troisième animal de compagnie, avec plus 5 millions de congénères !  Il n’y a pas que la rage que pourrait donner le furet.  Risque de tuberculose  … salmonellose … campylobactériose ou de nombreuses parasitoses , cette longue liste impose quand on   choisit un furet comme animal de compagnie de respecter de nombreuses précautions !

La fréquentation de rongeurs plus petits, voire plus classiques (lapins, rats, souris, chinchillas, hamsters, cobayes) n’est pas vraiment plus sûre : on peut par exemple y gagner une belle dermatose comme une acariose des rongeurs ou une teigne à Trichophyton mentagrophytes… Voire une maladie bien plus sérieuse : en 1974, des hamsters  distribués en cadeau de Noel ont ainsi entrainé une épidémie de choryoméningite lymphocytaire faisant des dizaines de victimes en Allemagne !

Reptiles : gare à la salmonelle !

Outre les risques de morsures ou de piqûres,  le contact avec les reptiles se fait ne serait ce que par le nettoyage du terrarium ou de l’aquarium. Les tortues aquatiques (en particulier de Floride) sont souvent agressives et vectrices de salmonelloses. Ainsi, des estimations avancent que 80% des tortues d’eau, 65% des lézards et 50% des serpents, hébergeraient des Salmonelles ! Comme le précise François Moutou «  Très régulièrement, des études épidémiologiques comparent les troubles intestinaux chez les enfants des classes abritant un reptile-le plus souvent une tortue) et chez les enfants des autres classes. Presque toujours la différence est significative ! ». Le problème est tel qu’aux USA,  un marché de tortues “salmonella free » s’est développé après qu’une grande  épidémie de salmonellose se soit déclenchée chez des propriétaires dans les années 1970 … éviter la salmonelle dans l’élevage n’est pas aisé : il faut « zénifier » les conditions d’élevage, puisque l’excrétion de la bactérie semble liée au  stress de l’animal !

Mais de grâce, ne les abandonnez pas !

Le problème est d’autant plus crucial que bon nombre de ces animaux risquent de se retrouver, abandonnés de leurs propriétaires  dans la nature, où ils constituent des réservoirs de maladie pour tout l’environnement : les  marsupiaux australiens (Trichosorus vulpecula),  appelés « possum » ou phalanger renard, sont des réservoirs de   tuberculose bovine… comme les tortues, vecteurs de la cowdriose, transmise par les tiques aux bovins.  Leur libération dans la nature risque donc d’entraîner en plus de graves désastres écologiques, en particulier dans les élevages ! Une raison supplémentaire, à la veille des vacances, pour ne pas abandonner ces « nouveaux animaux de compagnie » !

 Clara DELPAS

 

Pour en savoir plus

François  MOUTOU  La Vengeance de la civette masquée (SRAS, grippe aviaire…d’où viennent les nouvelles épidémies ?), 2007, Editions Le Pommier

ENCADRE

ESPECE MALADIE
Cobaye TeigneGale
Hamster Chorioméningite lymphocytaireTeigne
Furet GrippeRageCampylobacter

Salmonelloses

Tuberculose

Leptospirose

Listériose

Cryptococcose

Toxocarose

Giardiase

Mycoses (Dermatophytes)

Souris, gerbilles, chinchillas TeigneSalmonelloseYersiniose

Haverhilliose

Leptospirose

Chorioméningite lymphocytaire

Streptobacillus moniliformis

Taenia

Giardia

Cryptosporidies

Mycoses (Dermatophytes)

Chiens de prairie (interdits)  Variole du singePeste 
Lapin TeigneEctoparasitesPasteurelloses (morsure, griffure)

Salmonelloses

Yersiniose

Tularémie

Listérose

Rat EctoparasitesLeptospiroseStreptobacillus moniliformis

Peste

Typhus murin

Serpents et Reptiles (Iguane,Geckos)  CampylobacterMycobacterium marinumFièvre Q (serpents importés)

Salmonellose

Zygomycose

Yersinia

Aeromonas

Tortues SalmonellesYersiniaEdwardsiella tarda

Plesiomonas

 

Poissons Mycobactéries atypiquesErysipelothrixMelioidosis

 

 

 

 

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