Des sondes contaminées !

L’échographie est un examen non invasif utilisant les ultrasons générés par une sonde placée sur ou dans le corps selon les organes explorés. Pour les actes d’échographie endocavitaire, qui nécessitent l’introduction d’une sonde dans le vagin ou le rectum, la désinfection semble devoir être un acte particulièrement important. Or qu’il s’agisse des échographies rectales, auxquelles on recourt par exemple pour faire des biopsies de la prostate… ou des échographies vaginales, préconisées dans le suivi de grossesse ou le dépistage de tumeurs de l’ovaire, on peut se demander si les recommandations actuelles sont suffisantes … surtout depuis qu’elles ont été revues à la baisse! Jusqu’alors, les sondes devaient subir une décontamination dite de niveau intermédiaire : elles étaient d’un patient à l’autre soigneusement désinfectées, plongées dans une solution décontaminante, chargée d’éliminer bactéries, virus et champignons… Mais depuis, fin 2008, le Haut Conseil pour la Santé Publique (HSCP) a abaissé ce niveau de décontamination des sondes au niveau le plus bas. Principalement pour des raisons financières. Certains produits utilisés abîment les sondes et en imposent le renouvellement plus fréquent. Quant aux autres systèmes de décontamination (appareils à UV), ils imposent un budget d’équipement supplémentaire aux radiologues. Mais est-ce une raison suffisante pour prendre le risque de transiger sur la sécurité des patients ?

Un risque de contamination élevé

Aujourd’hui, les échographies endocavitaires pourraient bien être une nouvelle façon d’attraper papilloma virus, VIH, chlamydias, hépatite B et C, staphylocoques, etc… C’est pour éviter un nouveau scandale de santé publique, du type de celui du sang contaminé, que le LIEN (association d’information et d’aide aux victimes d’infections nosocomiales, et d’accidents médicaux), avec le CISS (Collectif Interassociatif sur la Santé) et l’association COLISEE (Collectif de Lutte contre les Infections par les Sondes d’Echographie Endocavitaire) tirent depuis quelque temps la sonnette d’alarme auprès des autorités sanitaires françaises… Bien sûr, les recommandations officielles se basent sur le fait que dans le cas des échographies vaginales ou rectales, les sondes sont recouvertes d’une gaine à usage unique et que, partant du principe que l’on change la gaine d’un patient à l’autre, le risque de transmission est a priori limité. A priori seulement. Car comment une telle gaine peut-elle enlever tout risque de contamination ? « D’abord, elle peut se déchirer (dans le cas des sondes vaginales, elle s’avère n’être souvent qu’un préservatif mal adapté), et puis, lorsque le praticien l’enlève pour la remplacer par une neuve, il risque de toutes façons par ces manipulations de disséminer les germes éventuels » explicite Claude Rambaud, présidente du LIEN. L’avis des spécialistes de l’association COLISEE est encore plus tranché : pour le professeur Guy Frija, ancien Secrétaire général de la Société Française de Radiologie « La gaine donne bonne conscience mais elle ne protège pas ». Quant au docteur Guillaume Kac, professeur d’hygiène à l’hôpital Georges Pompidou, il précise  : « les micro-perforations laissent passer les micro-organismes, et en particulier les virus ! » Une étude menée au CHU de Rennes sur le contôle microbiologique de la désinfection de sondes endovaginales a d’ailleurs confirmé en juin 2009 la contamination de nombreux prélèvements réalisés sur de telles sondes, après la prétendue désinfection ! Un résultat qui ne va pas du tout avec l’esprit des recommandations du HCSP  qui n’hésite pas à préconiser très sérieusement… l’examen visuel de la sonde par le praticien ! «  Expliquez-moi comment à l’examen visuel on voit si il y a une bactérie ou pas ! » s’insurge Claude Rambaud. Autre argument avancé par les autorités : le vagin n’étant de toutes façons pas stérile, à quoi cela sert-il de bien désinfecter les sondes ?   Une affirmation qui a le don d’énerver Claude Rambaud : « Qu’est ce que ça veut dire des choses comme ça ? À la limite, c’est sexiste. Ça veut dire que l’ on peut mettre n’importe quoi dans le vagin , que ça n’a pas d’importance ! » Enfin, dernier point mis en avant pour justifier l’absence de procédures plus rigoureuses : la prétendue absence de victimes. Pourtant, outre-Atlantique, des cas existent. Deux experts du CDC (Center of Disease Control, le Centre de Contrôle des Maladies, un organisme international de recensement des maladies, basé à Atlanta, dépendant de l’OMS) ont écrit à Roselyne Bachelot au printemps 2009 : « Il a été démontré que la perforation de la gaine conduisait à la contamination de la sonde. L’utilisation d’une sonde mal désinfectée a  déjà provoqué une transmission infectieuse. Les études soulignent la nécessité d’avoir une désinfection efficace entre chaque examen ». Ils n’ont reçu aucune réponse !

 

En première ligne, les femmes

 

Pourtant, le problème est de taille et les femmes sont en première ligne : pas moins de 4 millions d’échographies endocavitaires sont pratiquées chaque année en France. Si les échographies rectales lors d’une biopsie s’accompagnent souvent d’une couverture antibiotique pour parer tout risque de contamination, les échographies vaginales (2millions par an), ne sont pas soumises aux normes d’hygiène les plus élémentaires. Elles exposent, dans 30% des cas, à un risque infectieux. Un risque réel mais non reconnu. « Comment différencier une contamination par voie sexuelle d’une contamination par sonde d’échographie ? Ce sont les mêmes bactéries ! » explique Claude Rambaud, qui cite le cas d’une transmission infectieuse chez une veuve… Bien sûr, on ne peut rien prouver et c’est la parole des patients contre celle des autorités, qui faute de victimes « recensables », nient jusqu’à l’éventualité d’une contamination par sonde…

Silence radio du ministère

Depuis le printemps 2009, le Ministère a été saisi par les associations, et deux députés ont déposé deux amendements sur le sujet. Rejetés. La Ministre s’était alors engagée à réaliser une étude sur la pertinence des recommandations publiées par le Haut Conseil de la Santé Publique. L’étude est néanmoins indisponible, alors qu’elle est apparemment terminée puisqu’ annoncée sur le site de l’Académie de Médecine…! Relancer, une fois de plus ? « La ministre ne reçoit pas les associations. Si c’est pour voir un troisième rang qui ne saura pas me répondre… ou qui va encore me faire une réponse de langue de bois, ce n’est pas la peine », explique Claude Rambaud, un brin dépitée ! L’association COLISEE a mis en place une pétition en ligne sur son site internet. Mais une révision officielle des normes à la hausse semblant pour l’instant peu probable, comment se prémunir d’une contamination ? Demander à son gynécologue s’il désinfecte correctement ses sondes est loin d’être diplomatiquement évident ! Reste, pour l’instant, à prendre le premier rendez-vous de la journée, celui où le patient a la garantie que la sonde est parfaitement désinfectée, un rendez-vous, surnommé « rendez-vous du radiologue » par les initiés… Ou à mettre en place une charte à laquelle les praticiens pourraient souscrire pour garantir leurs bonnes pratiques. Reste juste à trouver comment mettre en place un tel système !

 

Des speculum à risque

Parce qu’ils sont aussi introduits dans le vagin, les speculum sont des instruments à risque de transmission infectieuse. «  Je connais des gynéco qui prétendaient qu’il suffisait de les mettre dans un bac dans leur baignoire avec un peu de produit vaisselle et que c’était suffisant, raconte Claude Rambaud.  Inutile de dire que ce traitement est inefficace! D’autant plus …quand on sait que nombre de médecins de ville n’ont pas même pas de lavabos dans leur cabinet !

 

 

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