Réchauffement climatique : quels risques pour la santé ?

Le changement climatique entraîne de nombreux risques pour la santé humaine. Une santé d’autant plus menacée que le récent sommet de Copenhague s’est soldé par un échec …cuisant !  

Paru dans Alternative Santé Février 2010

 

Le récent sommet de Copenhague, qui s’est tenu du 8 au 19 décembre dernier,   sous l’égide des Nations-Unies,  était supposé rassembler  par une sorte de «  contrat de confiance » 192 pays autour de la cause climatique. L’enjeu ? Un accord permettant de garantir à la planète un réchauffement inférieur à 2°C d’ici 2050.  Dans les faits, l’accord soumis aux discussions avait été rédigé par une poignée de pays et n’a pu être imposé au reste du monde. Car le sommet de Copenhague n’était pas un G20  et les pays en développement ont clamé haut et fort leur refus d’un   accord reflétant « un processus totalitaire et un manque de respect de la part des pays industrialisés » ! S’il y a un côté rassurant dans cette capacité de refus (non, décidément, tout n’est pas joué d’avance!), l’avenir de la planète reste menacé : car en l’état actuel des choses, l’élévation de la température  devrait avoisiner les 3¨C d’ici 2050.

Des changements climatiques  planétaires

L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), appuyée par les scientifiques du  GIEC  et de la communauté internationale, a plusieurs fois pointé le changement climatique rapide déjà à l’œuvre sur la planète, donnant l’alerté, depuis les années 2000, sur les risques sanitaires associés au changement climatique.  Un changement qui met dors et déjà en péril la santé humaine, en particulier dans les populations les plus pauvres.  Conséquences des modifications de la  production agricole et du cycle de l’eau, la malnutrition  (3,7 millions de morts), les diarrhées ( 2 millions de cas) et  le paludisme (1 million de cas) leur sont habituellement associées. Mais le risque sanitaire associé au réchauffement de la planète ne se cantonne pas aux pays en voie de développement ou à l’hémisphère sud : les conséquences du réchauffement climatique vont concerner tous les pays du monde ! Le changement climatique est déjà à l’œuvre :  rien qu’en France, au cours du siècle dernier, la température s’est réchauffée d’environ 1°C. Ce réchauffement conduit à plus de pluie en hiver, plus de sécheresse en été. C’est déjà le cas aujourd’hui, dans la plupart des régions. En 2050, la température devrait avoir augmenté sur notre territoire d’environ 2°C. Le réchauffement  conduit  à une élévation de température ainsi qu’à des modifications importantes du climat telles que la multiplication   des catastrophes météorologiques  ( pluies torrentielles,   inondations ou ouragans) ou l’augmentation du niveau des mers…

Canicules…

Du côté des conséquences sanitaires, bien sûr quand on pense réchauffement, on pense avant tout canicule. Celle de 2003 s’est soldée en Europe de l’Ouest par   70 000 décès de plus que les précédents étés. Pourquoi tant de morts ? La chaleur, seule, tue-t-elle ? Rappelons que les températures enregistrées n’atteignaient même pas  les températures enregistrées dans le nord de l’ Inde à la même période (47°C) ! La forte proportion de personnes âgées, isolées en période  de vacances… et le manque d’expérience face à une situation climatique inédite en Europe expliquent une bonne partie des choses.    Robert et Maya Kandel (1) complètent « En Europe, les fortes émissions d’oxydes d’azote et de composés organiques volatils – pollutions dues surtout au trafic automobile- ont été transformées en ozone par l’ensoleillement abondant, conséquence du blocage anticyclonique qui a permis la persistance de fortes températures ; et ce gaz toxique a certainement aggravé les risques pour la santé » .  Un cas d’école qui illustre le fait que les effets du réchauffement climatique  dépendent de multiples facteurs de risque, interagissant le plus souvent entre eux dans des enchaînements de cause à effet, ce qui rend  d’autant plus complexes leur analyse et leur prévision.  « Sous l’effet de la chaleur, les maladies infectieuses vont décupler et les pics de pollutions seront plus nombreux augmentant ainsi la mortalité des personnes cardiaques ou ayant des problèmes respiratoires. Enfin, la croissance de la quantité de pollen dans l’air favorisera une recrudescence des allergies. Ces événements engendreront des traumatismes profonds aussi bien sur la santé physique que mentale des individus. » résume l’Association Santé Environnement (ASEF) .  La chaleur par exemple , comme toutes les températures extrêmes , grands froids y compris, est certes associée à un plus grand nombre de décès par maladies cardiaques et respiratoires.  Mais elle rend aussi plus sensible aux  pollens et autres  allergènes aériens, ce qui pourrait aggraver l’asthme qui concerne près de 300 millions de personnes dans le monde… Les maladies liées à la pollution atmosphérique vont donc augmenter : le taux d’allergie en Europe passerait de   20 %  à 50% en 2050 (voire même dès 2015..). , dont  30 à 50% d’ asthmatiques.

…et autres maux…

Associée aux autres événements climatiques attendus (ouragans, inondations, tempêtes), l’élévation de la température pourrait bien conduire nos cours d’eau à abriter des hôtes indésirables, tels que le moustique vecteur du paludisme ou du virus du Chikungunya,  ou encore de virus du Nil occidental. Certaines espèces d’algues et micro-algues pourraient aussi proliférer,  avec des conséquences sanitaires  par l’intermédiaire de cyanotoxines qu’elles peuvent libérer dans le milieu aquatique. Et les bactéries pourraient se faire de plus en plus virulentes. On pense immédiatement à celles qui sont responsables des maladies diarrhéiques,  (choléra,      infections par E. coli et autres gastroentérites,     typhoïde,   maladies virales comme l’hépatite A ou septicémies) …Mais il y a aussi les bactéries du genre Legionella dans les réseaux intérieurs d’eaux froides des  immeubles, qui peuvent se développer au-delà de 25°C. Citons aussi les  infections liées à la bactérie Salmonella , déjà plus fréquentes en été, et d’autant plus susceptibles de se multiplier que les risques de défaillance de la chaîne du froid sont généralement accrus en période de fortes chaleurs ! De même, on redoute le développement de nombreux champignons microscopiques. Sur les matériaux de construction des habitats, où ils entraînent des pathologies irritatives et immunologiques, pouvant être mortelles chez les personnes immunodéprimées ou à risque.  Ou dans les aliments, où ils présentent bien évidemment des risques importants pour la santé humaine. Autre effet collatéral : la modification des écosystèmes suite au réchauffement. Prenons l’exemple de la diminution des zones d’enneigement : elle risque de donner l’espace au développement d’animaux porteurs de virus, comme cela a déjà été constaté en Suède avec des  rongeurs réservoirs de l’hantavirus Puumala… A cet inventaire, il faut bien sûr ajouter   la multiplication des cancers de la peau, lié en partie au fameux  « trou dans la couche d’ozone »   (appauvrissement de l’ozone stratosphérique) qui entraîne une surexposition aux rayons ultraviolets, risquant d’entraîner une augmentation des carcinomes cutanés et mélanomes malins, ( + 5% de    cancers de la peau en Europe !).

L’argument « santé » n’a pas pesé bien lourd dans la balance des négociations sur le climat à Copenhague, même s’il est fait mention d’une détermination à mieux apprécier la dimension humaine du changement climatique, à l’instigation de l’OMS…  Pourtant, qui peut ignorer que la lutte contre le réchauffement climatique est capitale  pour limiter des risques sanitaires inévitable ? En France, la loi 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle Environnement, prévoit un Plan national d’adaptation au changement climatique  en 2011. Lutte contre les inondations, adaptation des zones littorales, évolution des forêts, question de l’eau, adaptation de l’économie au changement climatique font partie des points inscrits au sommaire, à la suite du rapport remis fin novembre par l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC). L’élaboration de ce plan va faire l’objet d’une vaste concertation qui réunira tous les acteurs du Grenelle Environnement.  Officiellement lancée par Chantal Jouanno, secrétaire d’Etat chargée de l’Ecologie, le mardi 8 décembre 2009, précisément à l’ouverture du Sommet de Copenhague, cette initiative témoigne au moins que le problème est à l’ordre du jour des préoccupations politiques du moment. Reste à voir comment elles aboutiront …et quelle place sera faite aux problèmes de santé. La réponse, en février 2011.

 

(1)  Robert  et Maya Kandel – La catastrophe climatique – Ed.Hachette littératures 238 pages octobre 2009

 

 

POUR EN SAVOIR PLUS
L’ASEF, fédération nationale d'associations de santé environnement régionales, rassemble depuis 2008 près de 2 500 professionnels de santé en France et a pour mission d’informer le grand public, notamment sur les conséquences du changement climatique.
Association Santé Environnement-  France Europôle de l’Arbois- Avenue Louis Philibert- 13857 Aix-en-Provence Cedex 3 - http://www.asef-asso.fr

 

 

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