Les fruits inattendus de Fukushima

octobre 2012 Novethic

Le 14 septembre, le gouvernement japonais a annoncé au monde entier l’arrêt du nucléaire civil au Japon d’ici la fin des années 2030, tout en ne renonçant ni à la construction de nouveaux réacteurs ni à la production de plutonium. Il a de plus  ouvert la voie à de nouveaux marchés à l’étranger et adopté un amendement à la loi qui interdisait le recours à l’arme nucléaire.

Critiqué pour ses mensonges et son incapacité à gérer correctement les migrations de populations consécutives à l’accident,  le gouvernement japonais semble avoir tenu compte des manifestants, qui, tous les vendredis,   depuis mars 2012, se réunissaient devant le Parlement, grossissant leur nombre de 300 au début, à plus de 100 000 fin juillet… En partie seulement, car pour tous ces citoyens qui demandaient l’arrêt immédiat des centrales, 2039 reste une perspective lointaine. Et, d’ici là le développement des énergies renouvelables devrait s’intégrer dans un mixte énergétique autorisant la reprise d’activité de certaines centrales, dont, pour l’heure seules 2 ont été rouvertes (sur les 54 que comptent le pays). D’ailleurs,   le ministre japonais de l’industrie et de la Technologie a confirmé, dès le 15 septembre, la poursuite de la construction de deux réacteurs nucléaires.

Au cours d’une rencontre informelle avec la presse française, le 17 septembre, à l’IDDRI (Paris), des chercheurs japonais du programme DEVAST (Disaster Evacuation and Risk Perception in Democracies) [1] ont rappelé “le poids (trop) important de l’industrie nucléaire au Japon”. « Les municipalités dépendent du financement des industriels du nucléaire. Celle de Fukushima par exemple a autorisé l’implantation de la centrale dans une zone qu’elle savait être à risque sismique  et de tsunami » a précisé le professeur Shunji Matsuoka, de l’Université de Waseda.  Il a également rappelé le contexte politique particulier du moment : la tenue des prochaines élections en janvier 2013 dans le pays et le besoin pour le PDJ au pouvoir de regagner des électeurs. Car, si le LDP venait à repasser, il réviserait certainement la décision, ne pouvant  pas se mettre en porte-à-faux compte tenu de son rôle passé dans la nucléarisation du pays. Or un récent sondage a   confirmé que 70% des japonais interrogés étaient pour un arrêt total du nucléaire.   Mais quand bien même la décision d’arrêter les centrales serait maintenue, l’industrie nucléaire japonaise a plus d’une corde à son arc.

Les nouveaux débouchés de l’industrie nucléaire civile

Car  le Japon exporte des centrales nucléaires vers des pays en voie de développement (Vietnam, Indonésie, Philippines, Turquie, Lituanie), y compris  dans des zones à risques sismiques similaires à ceux de Fukushima. “Aux Philippines, les constructeurs japonais réhabilitent l’ancienne centrale nucléaire de Bataan, construite durant les années 1970 par Westinghouse, dans une zone fortement sismique qui jouxte le Mont Pinatubo. Au Vietnam, ils vont construire la première tranche du site de Ninh Thuan, situé au bord de la mer de Chine, dans une région côtière particulièrement exposée aux inondations, aux typhons et à des raz-de-marée ayant déjà atteint des hauteurs de 18 m” précise, depuis le Japon, Thierry Ribault, chercheur en économie   pour  la mission interdisciplinaire NEEDS (“Nucléaire : Énergie, Environnement, Déchets et Société », lancée au sein du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique) début 2012 pour une durée de 5 ans.) Des négociations sont en cours avec le Brésil, l’Inde, l’Afrique du Sud et le Mexique. Et un accord a été passé avec les États-Unis pour y installer la  première centrale nucléaire depuis 34 ans.  Tirant eux aussi leurs leçons de Fukushima, les industriels sont parvenus à transformer la gestion du désastre en argument commercial. Le Japon peut ainsi se présenter désormais comme expert  en catastrophe, et vendre, en plus de ses centrales, des plans de compensation pour les victimes éventuelles d’accidents nucléaires ! L’accord signé avec le Vietnam rappelle même à ce propos « qu’il est un devoir (pour le Japon) de partager au monde les expériences et les leçons de l’accident nucléaire de Fukushima » .

Par ailleurs, le Japon détient 157  tonnes de plutonium, dont une centaine sur les sites de ses centrales nucléaires, le reste étant parti dans les centres de retraitement : 45 tonnes se trouvent ainsi en Europe, prêts à être utilisé comme nouveau combustible (10 tonnes  au Royaume Uni, 35 en France). Or le 1er  juin, des officiels de l’industrie nucléaire japonaise ont annoncé vouloir dans les prochains mois produire une demi-tonne de plutonium supplémentaire.  Commentaire du professeur Frank von Hippel de l’Université de Princeton, une autorité mondiale en matière de non prolifération nucléaire : « C’est de la folie, il n’y a aucune raison de faire cela». Si ce n’est de vouloir légitimer l’existence du site de Rokkasho , dans le Nord du Japon.  Ce dernier, monté en partenariat il y a 20 ans avec Areva, n’a pour l’instant pas fonctionné plus de deux mois.   « Et coûterait trop cher à démanteler, précise Thierry Ribault. Or à pleine capacité, le site peut produire chaque année  8 tonnes de plutonium.  De quoi faire 1000 bombes atomiques. » Et devenir exportateur d’ armes.

Vers la bombe atomique japonaise ?

Que le Japon se mette à fabriquer des armes nucléaires reste pour l’heure impossible. Mais des évolutions très récentes le laissent envisager : le 15 juin, un amendement passé quasiment inaperçu a été apporté à la loi fondamentale japonaise sur l’énergie atomique, qui stipule que la recherche et l’utilisation de cette énergie ne peuvent être menées qu’à des fins pacifiques et dans le but de défendre des principes de démocratie, d’indépendance et de transparence. L’amendement établit désormais que « la politique nucléaire du Japon doit contribuer à la sécurité nationale ». La question du développement d’un arsenal nucléaire pour la défense du pays a été aussitôt soulevée par un député de l’opposition (PLD). Ce à quoi les députés de la majorité (DPJ) lui ont répondu qu’il s’agissait simplement « de rassembler tout ce qui concerne le nucléaire sous la même loi : la sûreté  nucléaire, le contrôle des garanties de l’AIEA (Agence Internationale pour l’Energie Atomique) visant à empêcher l’utilisation militaire de matériaux nucléaires et la sécurité nucléaire contre le terrorisme. »

Il ne manquerait cependant plus que l’article 9 de la constitution nationale soit assoupli pour que l’armement nucléaire japonais ait les coudées franches :  l’article 9 établit en effet que le Japon doit renoncer à la guerre comme mode de règlement des conflits internationaux.  « Mais cette révision semble tout à fait plausible », pronostique Thierry Ribault, « au vu de récents sondages d’opinion qui révèlent que 56% des opinions y sont favorables (contre 47% voici 3 ans) … » . Ce nouveau cadre législatif pourrait alors inspirer  la Corée du Sud à revendiquer elle-aussi sa souveraineté nucléaire. Et entraîner une course à l’armement dans la zone asiatique, où les tensions politiques sont actuellement très nombreuses. « Des perspectives pour le moins inquiétantes, souligne Thierry Ribault, mais qui révèlent  aussi que le désastre de Fukushima porte les fruits les plus inattendus. »

The « Bright Future » of Japan’s Nuclear Industry    


[1] DEVAST (Disaster Evacuation and Risk Percepetion in Democracies) est un programme soutenu par l’ANR (Agence Nationale de la Recherche) et la JSTA (Japan Science and Technological Agency). Il porte sur l’évolution de la perception du risque dans la démocratie.

Le Gange : en attente d’un miracle ?

Le 31 mai 2011, la Banque Mondiale annonçait le versement d’un milliard de dollars pour la dépollution du Gange. Cette somme, promise depuis fin 2009, est une ultime chance pour tenter de sauver un fleuve en voie d’asphyxie.

Le professeur Mishra, Mahant du Sankat Mochan Mandir, ne se consacre plus qu’aux enseignements spirituels. Le programme de dépollution du Gange qu’il a mis en place? Il n’en parle même plus!

Le Gange est pollué. Le problème n’est pas neuf, certes. Il revient, régulièrement, à la une des actualités, à la faveur des promesses gouvernementales, des aides internationales et des actions des ONG. Mais il est de plus en plus gros. Le fleuve sacré fait aujourd’hui face à une pollution extrême, qui met en péril la biodiversité et la durabilité de son environnement. Le Gange représente 25% de toutes les réserves en eau de l’Inde, qu’il sillonne sur 2525 kilomètres. 400 millions de personnes vivent sur ses rives. Il charrie depuis sa source, au nord-ouest de l’Himalaya, jusqu’au golfe du Bengale, près de 2 milliards de litres d’eaux usées. Nul besoin de grandes études ès microbiologie : eaux souillées rime avec risque pour la santé ! D’autant que le fleuve charrie aussi  carcasses d’animaux et  dépouilles humaines, qui en se décomposant relarguent les bactéries pathogènes contenues dans leurs intestins (des colibacilles fécaux).   Rien d’étonnant à ce que son delta, le plus grand du monde, soit aussi le réservoir mondial historique du choléra. Même si pour la plupart des indiens, le Gange continue d’être sacré, donc propre. Dans ce pays où  « tout est possible » (comme le dit le diction populaire « Sab Kuch Milega »), la foi l’emporte sur la science, et il est bien difficile d’agir. A moins d’être un Mahant (grand prêtre) comme Veer Badhra Mishra, du Sankat Mochan Mandir, le grand temple d’Hanuman à Vanarasi. Lui qui fait ses ablutions rituelles tous les matins dans le Gange depuis  plus de 72 ans, refuse publiquement de boire la traditionnelle gorgée d’eau. «  Il faudrait être aveugle ! » ironise-t-il…en connaissance de cause.

Entre corruption et incompétence

Car en plus d’être prêtre, Veer Badhra Mishra est ingénieur du génie civil et a longtemps été professeur d’hydrologie  à l’Université de Bénarès. Au début des années 1980,  avec des amis, et bien avant que l’on ne parle de programmes gouvernementaux de dépollution, il a monté un laboratoire d’analyse, puis une ONG,  la Sankat Mochan Foundation (SMF) en 1982, afin d’ informer les gens de la réalité de la pollution du fleuve. Il a ainsi montré que la teneur en colibacilles fécaux explosait toutes les normes de salubrité, avec des records prévisibles aux drains de déversement des égoûts de la ville.  Et démarré un  combat pour la réhabilitation du Gange qui a probablement contribué au lancement du  programme gouvernemental de dépollution du fleuve : le GAP (Ganga  Action Plan)  initié en 1986.  Cet ambitieux programme de dépollution, déjà soutenu en son temps par la Banque Mondiale,  intégrait la mise  en place de pompes à déchets aux points de relargage des ordures, des centrales de retraitement des eaux usées, ainsi que l’installation de toilettes publiques et de crematorium électriques. Dans les faits, il semble avoir surtout existé sur papier et servi  à emplir les poches des responsables politiques  chargés de sa mise en œuvre.  De plus, le peu de choses réalisées   ne tenait   même pas compte de deux problèmes majeurs en Inde dans le bassin gangique : la mousson et les coupures électriques. Une solution intelligente, proposée par la SMF et l’Université de Berkeley (USA) consistait-elle par exemple à utiliser la gravité plutôt que l’électricité pour acheminer les eaux usées de Vanarasi à la centrale de retraitement via un ingénieux système de bassins communiquants?  Le gouvernement a préféré financer des modèles tout prêts de centrales fonctionnant  à l’électricité, inopérantes en cas de coupures électriques, et refluant leur contenu directement dans le fleuve en cas d’inondations… ou aux capacités bien trop limitées, à l’exemple de l’usine de retraitement de Kampur, ville réputée pour ses 400 tanneries et le chrome hexavalent qu’elles rejettent, qui n’a qu’une capacité de traitement de 9 millions de litres par jour,  alors qu’un responsable de la centrale lui-même estime le volume d’eau à traiter à 40 millions de litres par jour ! Autre exemple, la création très médiatisée, à Vanarasi,  d’un sanctuaire de tortues entre Raj Ghat et Ramnagar Stretch : les tortues supposées dévorer les restes des cadavres du fleuve ont bien vite été, comme cela pouvait être prévisibles, braconnées par ceux qui sur les rives meurent de faim ! Peu à peu, le GAP s’est délité dans l’absence de fonds pour poursuivre le programme. Tout comme la motivation du Pr. Mishra, ovationné à Rio en 1992, élu homme de la planète par   Time Magazine en 1999, et aujourd’hui quelque peu désabusé : depuis 2003, le site de sa fondation n’est plus tenu à jour ; le tableau  noir accroché à la porte de son laboratoire sur le Tulsi Ghat et censé relayer à la craie les résultats d’analyse de potabilité de l’eau du Gange n’a pas servi depuis longtemps. Parler de pollution du Gange, même, semble l’ennuyer profondément tant il élude poliment les questions. Difficile pour un saint homme de râler contre la bureaucratie indienne ?

La science à l’épreuve de la foi

Sous l’égide de la NGRBA (National Ganga River Bassin Authority) spécialement créé fin 2009, le milliard de dollars promis par la Banque Mondiale pour ce nouveau programme sera-t-il mieux géré ? Dans les faits, cette somme, qu’il aura fallu un an et demi pour débloquer, se répartit entre les deux instances constitutives de la Banque Mondiale :  un don de 200 millions de dollars de l’Association Internationale pour le Développement (IDA)  et un prêt à faible taux d’intérêt  de 800 millions de dollars de la Banque Internationale pour la reconstruction et le développement (IBRD). Un « Centre de Connaissances du Gange » a par ailleurs été créé pour établir un état des lieux, et probablement  aider à constater l’avancement effectif des travaux … Au programme, nettoyage du fleuve et mise en place de programmes de conservation. Comme à Patna par exemple, l’une des villes les plus polluées du fleuve, où un projet de promenade  plantée de 6km de long, vient d’être agréé par la NGRBA. Il n’est pas sûr que ces ambitions largement médiatisées déjoue le « à quoi bon » de tous ceux qui continuent de croire que le Gange est un fleuve sacré que purifie  Shiva  et/ou ne se sentent pas impliqué dans les programmes gouvernementaux  (au cours d’une réunion publique menée fin septembre 2011 à Vanarasi, l’activiste écolo Rajendra Singh  a d’ailleurs dénoncé l’échec de la NGRBA à impliquer la société civile dans les programmes de dépollution   ( article du Times of India du 22/09/2011 ) : tout ici est si fortement empreint  de religieux que le gouvernement n’ose même pas prononcer les mesures élémentaires  de protection des populations … Déclarer l’eau du Gange non potable, voire même interdire aux hindous de s’y baigner ? Impensable au risque de déclencher des émeutes dignes des guerres de religion ! De même, la régulation des crémations qui continuent de se dérouler comme le veut la tradition, à l’air libre… ou de toute autre pratique religieuse telle celle qui consiste à jeter dans le fleuve des couronnes de fleurs bénies par les brahmanes des temples ou   d’y faire flotter de petites bougies  en paraffine (dérivé d’hydrocabures ) …   Sans parler bien sûr du trafic fluvial des bateaux à moteur ! Si l’on peut concevoir que Shiva soit capable de « retraiter » les pêchés des fidèles qui s’y baignent, il est difficile d’admettre qu’il élimine aussi les microbes, les  effluents toxiques des industries pharmaceutiques de Hrishikesh ou des tanneries de Kampur, la dioxine des cendres de tous les bûchers de crémation de Vanarasi, et les divers plastiques, résidus de lessive, et autres détritus qui y plongent. Mark Twain au siècle dernier disait qu’aucun microbe digne de ce nom ne pourrait survivre dans les eaux du Gange : on ne peut pour l’heure que s’étonner de ce qu’il n’y ait pas plus d’épidémies de choléra ! C’est peut-être bien là que l’on  pourrait parler des miracles du Dieu Shiva !

Clara DELPAS

Paru dans Novethic le 30/11/2011

Mars 2012 : une contribution française importante

Le robot Curiosity est la grande vedette de la mission Mars Science Laboratory (MSL) orchestrée par la NASA qui devrait être lancée depuis Cap Canaveral (Floride) le 25 novembre prochain. À son bord, l’échantillon de macusanite P1891 quitte pour toujours, la collection minéralogique du muséum national d’histoire naturelle !

La grande question « Y a-t-il eu de la vie sur Mars ? » se pose pour les chimistes sous cette forme : « Existe-t-il sur Mars des composés carbonés ? » Pour y répondre, la NASA n’a pas lésiné sur les moyens : elle ambitionne d’envoyer sur place, et plus précisément dans le cratère GALE (un cratère de 154 kilomètres de diamètre au centre duquel culmine une montagne de plus de 5000m) [->http://www.universcience.fr/fr/science-actualites/articleas/wl/1248123976290/un-cratere-pour-curiosity/], « Curiosity », un véritable laboratoire technologique robotisé. Le décollage est prévu le 25 novembre prochain… et l’arrivée sur Mars le 6 août 2012

Une mission surpuissante

Ce « rover » de près de 1 tonne et de 2 mètres de long, qui a coûté la bagatelle de 2,5 milliards de dollars, recèle à son bord pas moins de 10 instruments scientifiques ultrasophistiqués. Deux d’entre eux ont été conçus par des équipes françaises (1) : essentiels, ils sont en quelque sorte « les yeux » et le « cerveau » du robot chargé d’étudier les traces de vie martienne, mais aussi les processus physico-chimiques d’évolution de la planète :

  • Le ChemCam (Chemistry Camera), le premier laser jamais envoyé dans l’espace, contribue à déterminer à distance la composition chimique des roches martiennes. Perché en haut d’un mât, il constitue « les yeux » du robot. Capable de tirer jusqu’à 7 mètres, il permet dans un premier temps de sélectionner les roches les plus pertinentes à analyser : la lumière émise par le plasma gazeux qui résulte du tir laser est en effet  analysée par le spectromètre auquel est couplé le laser, ce qui permet de caractériser les divers éléments chimiques qui composent la roche. Avant tout déplacement du robot pour aller éventuellement les prélever pour un second tour d’analyses.
    
  • Le SAM (Sample Analysis at Mars), un laboratoire portatif capable d’analyser en chromatographie en phase gazeuse les échantillons du sol et du proche sous-sol de Mars.
    

Une pierre du muséum sur le robot

Parmi les cibles utilisées pour étalonner le laser se trouve une roche naturelle la macusanite P1891, choisie dans les collections minéralogiques du Museum National d’Histoire Naturelle de Paris. Suffisamment compacte pour supporter les vibrations d’un voyage dans l’espace, cette roche volcanique originaire du Pérou a dû, compte tenu de l’inaliénabilité des collections, faire l’objet d’un don du muséum et d’une autorisation de sortie de territoire ! Pour un voyage sans retour…

Clara DELPAS

(1) Au premier rang desquelles des équipes du CNRS, ainsi que du pôle de planétologie de l’Observatoire Midi-Pyrénées, du CNES (Centre National d’Études Spatiales), du Latmos, du LISA (Laboratoire interuniversitaire des systèmes atmosphériques), et du MNHN (Museum National d’Histoire Naturelle)

macusanite en bas à droite du porte échantillon embarqué sur le Robot

macusanite en bas à droite du porte échantillon embarqué sur le Robot

Roche P1891 (macusanite) ds la collection du Museum National d’Histoire Naturelle

Roche P1891 (macusanite) ds la collection du Museum National d'Histoire Naturelle

(1) Au premier rang desquelles des équipes du CNRS, ainsi que du pôle de planétologie de l’Observatoire Midi-Pyrénées, du Cnes (Centre National d’Etudes Spatiales) , du Latmos, du LISA (Laboratoire interuniversitaire des systèmes atmosphériques) et du MNHN (Museum National d’Histoire Naturelle)

Pourquoi a-t-on choisi une macusanite?
Violaine Sautter, Directeur de Recherches au CNRS travaillant au sein du Mnhn

Et pourquoi plus particulièrement l’avoir choisie dans les collections du muséum? Celles-ci ne sont-elles pas inaliénables?
Violaine Sautter, Directeur de Recherches au CNRS travaillant au sein du Mnhn

Publié sur le site de Science Actualités le 28/11/2011

Ondes électromagnétiques : vers une harmonisation européenne des normes ?

Le 10 octobre dernier, à Bruxelles, un atelier de travail au Parlement Européen a invité la Commission Européenne à réviser ses recommandations en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques. Des recommandations qui datent de 1999.

La Commission Européenne a une nouvelle fois été très critiquée : « non-application du principe de précaution, recommandations obsolètes et ségrégation scientifique… » Telles sont les trois critiques majeures qui ont émergé de l’atelier organisé par les parlementaires Michèle Rivasi, Kriton Arsenis et Frédérique Ries, un atelier qui réunissait scientifiques, politiques, acteurs associatifs et citoyens  autour de la question de la téléphonie mobile. Avec l’appui des scientifiques présents, l’atelier -« Early warnings The case of Mobile phone & Head Tumors » (Signauxd’alerte précoces : le cas du téléphone mobile et des tumeurs cérébrales)- était d’abord l’occasion de rappeler, que   la nocivité des ondes de la téléphonie mobile, mais aussi des téléphones  sans fil , et du wifi, ne fait aujourd’hui plus de doute.

Un risque bien établi

Ainsi, le Dr. David Gee, de l’Agence Européenne pour l’Environnement, s’est étonné qu’à l’instar de ce qui s’est passé  pour l’amiante,  et alors qu’aucun scientifique ne conteste plus que l’ exposition  aux ondes électromagnétiques a des effets délétères sur les tissus du corps humain , la société semble toujours incapable de prendre les mesures adéquates pour protéger le public. Il a notamment rappelé que le délai d’apparition d’un cancer à la suite d’ une exposition à des radiations ionisantes, telles que les bombes nucléaires japonaises, s’étendait de 15 à 50 ans. Et qu’ainsi, même si les conclusions de l’étude Interphone pouvaient sembler rassurantes, pondérées qu’elles sont par une grande  prudence scientifique, personne ne pouvait affirmer aujourd’hui qu’il n’y avait aucun  risque.
Le Dr. Lennart Hardell, Professeur au Département d’oncologie de l’hôpital Örebro en Suède, a présenté les résultats de ses études, qui portent sur plus de 4000 individus : le risque de tumeurs cérébrales malignes et de neuromes acoustiques liés à l’usage des mobiles ou téléphones sans fil DECT, augmente avec le temps de latence et le nombre d’heures de téléphonie cumulées. L’élu socialiste grec, Kriton Arsenis, a présenté pour sa part deux études scientifiques indépendantes sur les effets cancérigènes avérés de l’utilisation de téléphones mobiles chez des enfants et des femmes enceintes.
Quant à l’eurodéputée verte française Michèle Rivasi, également fondatrice du CRIIREM, elle a précisé qu’outre le cancer ou la leucémie infantile, l’exposition aux ondes électromagnétiques était aussi désormais évoquée dans bien d’autres  pathologies comme la maladie d’Alzheimer, les  troubles du sommeil et certains  problèmes psychologiques.

 

« Inexcusable silence »

 

« Nous sommes au-delà de la phase d’alerte concernant l’utilisation abusive de la téléphonie mobile », a-elle affirmé. »  Il serait donc grand temps selon elle que  la commission  informe le public et révise enfin les limites d’exposition qu’elle a fixées… en 1999 ! « A cette époque, de nombreux appareils sans fil (GSM, téléphone DECT ou wifi n’existaient pas encore », a renchéri l’eurodéputée libérale belge Frédérique Ries, elle-même auteur d’un rapport adopté à la quasi unanimité par le Parlement Européen en 2009 et visant à une reconnaissance officielle du risque sanitaire généré par une exposition chronique aux champs électromagnétiques.
D’autant  que l’OMS reconnaît aujourd’hui que les ondes électromagnétiques de la téléphonie peuvent être cancérigènes. Au mois de juin dernier, en effet, le CIRC (le Centre International de Recherche sur le Cancer), a ainsi révisé sa classification : à la suite d’une réunion d’experts, le risque de cancer lié à l’exposition à des ondes électromagnétiques de la téléphonie mobile est passé  dans la catégorie 2A, qui signifie « peut être cancérigène » (voir article lié). Pourtant, depuis, aucune nouvelle recommandation n’a été formulée au niveau des institutions européennes.
Pourquoi ce risque avéré tarde-t-il tant à être pris en compte ? D’un point de vue scientifique, il faudrait certes des études complémentaires pour lever toutes les ambiguités. Et personne n’ignore que cela prend du temps…et que les fonds manquent pour financer de telles études indépendantes (au rang des mesures simples à mettre en œuvre, a été évoquée d’ailleurs l’instauration d’une taxe reversée par les fabricants sur les téléphones vendus à un fond spécifique).

Le député belge Paul Lannoye a dénoncé ce retard qui  selon lui « ne rend guère service qu’à l’industrie de la téléphonie mobile ». Tandis que le Dr. David Gee a rappelé une étude de la revue  Environmental Health Perspectives montrant que les études financées par la téléphonie mobile tendent majoritairement, comme par hasard,  à établir qu’il n’y avait pas d’effet…
Les fameuses limites de 1999 ? Elles ont été fixées  par le comité scientifique des risques sanitaires émergents et nouveaux (SCENIHR), une instance de la commission européenne, dont le représentant à l’atelier, Matts-Olof Mattson, a rappelé le fonctionnement. Ces normes devraient être revues prochainement, à la faveur d’un colloque international organisé les 16 et 17 novembre prochains…mais auquel, bizarrement, aucun des scientifiques indépendants à l’origine d’études établissant des dangers des champs électromagnétiques n’a été invité ! Ce que dénoncent les trois eurodéputés qui ont émis le souhait, avec la DGSanCo, que le comité revoie les modalités de recrutement des participants à ce colloque…. Affaire à suivre le mois prochain, donc.

Clara Delpas

Paru dans Novethic du 13-10-2011

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Stevia : le démarrage de la filière bolivienne

paru dans Science Actualités en mars 2011

En Bolivie, des paysans se lancent dans la culture de la Stevia, dont les extraits sont de puissants édulcorants naturels, intéressant le marché des additifs alimentaires… Reportage sur le terrain.

Un nouvel engouement

Communauté d’El Salado, à 50 km au nord de Bermejo, sur la route de Tarija. Ici, dans ce paysage verdoyant, 80 familles ont entrepris de dédier 30000 m2 de leurs terres à la culture de la Stevia rebaudiana Bertoni, une plante buissonnante héritée des Indiens guaranis. Les « campesinos » (=paysans) d’El Salado ont auparavant bien étudié la question. Car, pour ces cultivateurs de canne à sucre, investir dans la culture de la Stevia demandait quelques garanties. Une étude préalable a su les rassurer : dans cette zone du sud de la Bolivie, à la frontière  Argentine et à 416 mètres d’altitude, il fait 22,5 °C en moyenne toute l’année et il pleut suffisamment, pour que la Stevia s’y plaise :  plus de 1100mm par an (1776 mm en 2008) répartis sur les 12 mois de l’année soit plus du double que dans la région viticole de Tarija, de l’autre côté des montagnes (616 mm/an) … La plante, qui pousse sans avoir besoin de produits phytosanitaires coûteux et de circuits d’irrigation, les a séduit en 2007. Ici, mais aussi dans d’autres régions de la Bolivie, elle est en train de gagner du terrain.

Dans la région de Bermejo, les paysans d’El Salado se sont mis depuis 2008 à la culture de la stevia.

Feuilles de stevia contre feuilles coca ?

Pourtant, question feuilles, la Bolivie est plus réputée pour celles de coca, un symbole national ! Celles ci sont consommées traditionnellement par les boliviens, mais servent aussi à synthétiser de la cocaïne, illégale, et dont la Bolivie est le troisième producteur au monde…  Or la stevia semble séduire aussi quelques paysans cultivateurs de coca, qui se reconvertissent à sa culture. Il faut dire qu’elle rapporte  aujourd’hui plus que celle de la coca du narcotrafic ! (en 2008, le kilo de feuilles de coca se négociait autour de 3 euros, tandis que celui de feuilles de stevia rapporte plus du double, soit 7 euros environ  !) . Des coopératives de producteurs de stevia se montent comme  dans la région de Wernes (Santa Cruz), et des ONG financent des programmes, comme Frère des Hommes par exemple, qui a engagé un plan de plus de 80 000 dollars  (environ 60 000 euros) pour aider les paysans de la région de Caranavi (La Paz) à se mettre à la culture de la Stevia.  Un premier symposium sur la production et la commercialisation de la stévia en Bolivie , s’est même tenu à la dernière foire agricole de Santa Cruz le 15 avril 2010  :  Il a confirmé que l’engouement bolivien pour la Stevia était bel et bien réel , même si    pour l’instant, l’ensemble des surfaces qui lui sont consacrées restent faibles : de 12 à 15 hectares, contre toujours plus de 30 000 hectares pour la coca …

C’est   en plein cœur des terres guaranis, non loin des chutes d’ Iguaçu, qu’on   trouve la Stevia poussant à l’état sauvage. Le Paraguay voisin,   en reste, en Amérique du Sud, l’un des principaux producteurs ( avec l’immense Brésil !) : les surfaces cultivées paraguayennes devraient passer à 15000 hectares d’ici 2012…

De la plante à l’extrait convoité de rebaudioside A

Les conquistadors espagnols notaient déjà  comment avec une simple feuille les indiens Guaranis sucraient des jarres entières de maté. Un pouvoir sucrant  expliqué dans les années 1930  par les analyses du chimiste Bertoni : les feuilles contiennent de nombreuses molécules édulcorantes notamment du stévioside (5 à10%) à l’arrière goût réglissé et le rebaudioside A (2 ou 4 %), 300 fois plus sucrant  que le sucre!  C’est d’ailleurs pour cela que la stevia a le vent en poupe , surtout depuis 2008 : la FDA (Food and Drug Administration) aux Etats-Unis a  alors accepté que les firmes Coca-Cola et Pepsi-Cola en utilisent des extraits pour sucrer leurs sodas. Et cette autorisation très attendue par les industriels de l’agroalimentaire qui cherchent depuis longtemps un remplaçant à l’aspartame, accusé de nombreux maux,  accroît de fait la demande en stevia… Pourtant, sur ce nouveau marché, les boliviens doivent se faire une place. Car la concurrence est rude et cela fait longtemps que la plante est cultivée de façon intensive…  en Chine !  

De la plante à l’extrait  Les feuilles sont mises à sécher, puis infusées dans l’eau. La solution passe ensuite sur des résines qui vont en piéger les différentes molécules sucrantes. Les résines sont lavées avec un solvant (ethanol par exemple), et les différents extraits récupérés mis à sécher. On obtient ainsi un « cristal ». Il faut 12 kg de feuilles pour 1kg de cristal de rébaudioside A , le seul édulcorant autorisé.

La Chine, premier producteur mondial

Dans les années 1960, les Japonais, sur le point d’interdire l’aspartame dans tous leurs aliments,  ont rapporté des plants de stevia d’Amérique du Sud pour leurs pouvoirs sucrants et négocié avec les Chinois pour qu’ils la cultivent sur leurs vastes terres : à présent, les cultures chinoises de stevia s’étendent sur plus de 20 000 hectares ! De quoi produire plusieurs millions de kilos de feuilles, en considérant un rendement de 1500 à 3000 kg de feuilles par hectare. Et quelques milliers de tonnes d’extraits. La Chine contrôle aujourd’hui près de 80 % de la production mondiale, dont 2000 à 3000 T sont consommés   tous les ans rien que par les Japonais et les Coréens. Même si de nombreux pays se sont depuis mis à la culture de la stevia : Inde, Australie, Israël, Russie, Afrique du Nord, États-Unis, Canada, Amérique du Sud, et…depuis cette année, France ! Un essai dans l’Hérault, autorisé par la DGCCRF, est mené sous la direction de la chambre d’Agriculture de l’Hérault !

Une place à prendre

En Bolivie, les conditions climatiques, proches de celles du lieu d’origine de la stevia, et les pratiques de culture, traditionnelles et peu versées dans l’agriculture intensive, devraient encourager la culture de cette plante. D’autant plus si les filières de transformation permettent sur place d’en obtenir directement des extraits purifiés. C’est déjà le cas, avec plusieurs entreprises, qui transforment la stevia et fabriquent les extraits. Même si en août 2010, un scandale de la stevia frelatée a éclaté : une association de consommateurs a fait analyser les extraits vendus par 4 firmes boliviennes qui se sont avérés être coupés à 20 % par de la saccharine ou du cyclamate de sodium. De quoi certes semer le trouble sur les ambitions boliviennes à prendre place sur ce marché mondial  ( la Bolivie exporte déjà quelques 20 tonnes d’extraits à destination de l’Europe et de l’Iran, censés être purs… à 97% ! ). Mais aussi, plus probablement, d’instaurer de nouvelles procédures de contrôle et de nouveaux labels de  qualité !

Un marché tributaire des autorisations mondiales

La stevia, en tant que plante (feuilles) était consommée aux Etats-Unis, à l’instar des indiens guaranis (les feuilles suffisent à sucrer)  et classée à ce titre comme simple aliment. Mais un jour de la fin des années 1980, un   industriel a eu l’idée d’en utiliser des extraits pour sucrer des biscuits commercialisés sur le marché. La FDA s’est saisie de l’affaire,  car l’extrait de stevia n’avait jamais été homologué comme additif alimentaire.  Pour ce faire, la FDA exige  la constitution d’ un dossier toxicologique complet afin de garantir une innocuité absolue (d’où des études longues et coûteuses…). Ce n’est donc que depuis 2008 que l’extrait de rébaudioside A est autorisé aux Etats-Unis. Alors qu’il l’est…depuis 1970 au Japon ! Suivant de peu l’autorisation américaine, l’avis favorable de l’AFFSSA a conduit à l’autorisation de mise sur le marché français du rébaudioside A depuis 2009 comme additif alimentaire et depuis 2010 comme édulcorant de table. L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) ayant émis le 14 avril 2010 un avis favorable sur l’ensemble des glycosides de stéviols (stévioside, dulcoside A, rubusoside, steviolbioside, rébaudioside A, B, C, D, E et F) en tant qu’additifs alimentaires, on peut penser que les autorisations seront étendues aux autres édulcorants de la feuille de stevia. Et que le marché de la feuille de cette plante sucrante sera encore amené à s’étendre.

Faut-il avoir peur de la bactérie tueuse ?

Une épidémie de gastro-entérites hémorragiques a frappé l’Allemagne au mois de mai dernier. En cause, une contamination bactérienne par voie alimentaire. Et un problème de taille : impossible de trouver l’aliment responsable ! Une histoire pareille peut-elle arriver en France ?

Le 19 mai dernier, à Hambourg, dans le Nord de l’Allemagne, l’alerte était lancée au centre médical universitaire du centre de contrôle des maladies de l’Institut Robert Koch. Des centaines de personnes se présentaient depuis début mai aux urgences des hôpitaux de tout le Nord de l’Allemagne, avec des gastro-entérites sévères doublées de syndrome hémolytique urémique (SHU) hémorragique. En clair, des diarrhées aigues, avec du sang dedans, et une infection urinaire hémorragique entraînant des complications rénales pouvant être fatales. La bactérie responsable ? Escherichia Coli   (E.coli), une bactérie habituellement commune de notre tube digestif. Les patients ayant déclaré avoir mangé des tomates crues, des concombres et des laitues, les soupçons se sont aussitôt portés sur les légumes… Concombres espagnols, puis graines germées de Basse-Saxe, se sont retrouvés sur la sellette : en vain, l’aliment coupable, restait inconnu à la mi-juin. La bactérie avait déjà fait alors plus de 20 morts et plus de 2000 malades.

Des épidémies assez fréquentes

Ce n’est pourtant pas la première fois qu’une épidémie à E.Coli et en particulier à E. coli entérohémorragique, par voie alimentaire, survient, loin s’en faut. En 1982, aux États-Unis, des hamburgers insuffisamment cuits provenant d’une chaîne de restauration rapide avaient fait des centaines de victimes. Et, régulièrement, des épidémies sont recensées, de diverses causes alimentaires…: à Washington en 1993, liée à la consommation de hamburgers : 501 malades, 45 SHU et 3 décès ; au Japon en 1996, liée à des radis blancs : 9451 malades et 12 décès ; en Écosse en 1996 : liées à de la viande de bœuf avec 137 malades et 10 décès. En 2006, des épinards contaminés ont infecté 199 personnes aux États-Unis, causant des infections des reins.     Et en mars 2008,  près de 2,5 tonnes de viande potentiellement contaminée par une souche d’Escherichia Coli entérohémorragiques (EHEC) avaient  été mis en vente ! L’épidémie allemande, en revanche, est particulière : il s’agit d’une souche d’E.Coli  très virulente et  encore jamais rencontrée, la souche O104: H4, une bactérie entérohémorragique à Escherichia Coli   (EHEC).

Mécanisme de contamination

E.Coli est une bactérie commune, habituellement très minoritaire dans la flore intestinale du tube digestif de tous les êtres vivants (voir précédent numéro), mais qui peut devenir extrêmement virulente.   Elle peut se transmettre par voie alimentaire, contaminant aussitôt le système digestif. Et, sachant que les bactéries peuvent se reproduire toutes les 30mn, les dégâts arrivent vite. D’où vient-elle ? Du tube digestif des animaux et de leurs excréments. Ce qui explique que les deux principales catégories contaminées sont les steaks hachés et les végétaux. Les premiers, parce qu’il arrive, dans les abattoirs, que lors de l’abattage de la bête, les bactéries de son tube digestif en viennent à contaminer la viande… Les seconds, parce que les déjections animales sont souvent épanchées sur les champs, en guise d’engrais. Et pourquoi est-elle si virulente ? En cause, probablement, l’usage immodéré des antibiotiques dans les élevages (voir Alternative Santé n °362  ), qui permet aux souches bactériennes les plus résistantes aux antibiotiques d’être sélectionnées…

Une menace européenne ?

Les consommateurs européens se sont mis à craindre les légumes, entraînant partout une baisse des ventes et des destructions de stock par les producteurs eux-mêmes (comme à Nantes, le 6 juin par exemple). La recherche infructueuse de l’agent alimentaire responsable pose question, car son identification reste la seule façon d’enrayer l’épidémie. Et les erreurs sont lourdes de conséquences…L’Espagne, dont les concombres étaient dans un premier temps boycottés, a porté plainte auprès de la Commission Européenne pour le préjudice subi.  Posant question également, la surveillance et le système d’alerte en cas d’épidémie.  En France, la surveillance de telles infections est réalisée par un dispositif spécifique coordonné par des organismes comme l’Institut Pasteur ou  l’InVs… Mais les délais restent trop longs : 10 jours par exemple en France, lors de l’épidémie de steaks contaminés en mars 2008, entre le moment où la bactérie a été identifiée à l’abattoir et celui où les stocks contaminés ont pu être saisis.   Pour Pierre Franchomme, aromathérapeute,  c’est évident : « On aurait pu faire quelque chose en Allemagne en milieu hospitalier. Donner par exemple des doses massives d’aromanutriments comme le 801, un puissant bactéricide, testé cliniquement sur les cystites colibacillaires, et qui associe  des huiles essentielles de Curcuma de Java (Curcuma xanthorrhiza), de Thym (Thymus vulgaris), Origan vulgaire à carvacrol (Origanum vulgare) et Cannelle de Ceylan (Cinnamomum verum, cortex). »  Jean-Michel Morel, phytothérapeute (1), précise : « Le traitement préventif ou curatif des gastro-entérites à E.Coli passe par la restauration d’une flore intestinale de qualité, avec les probiotiques ; l’activation des défenses immunitaires, avec les polysaccharides que contiennent des plantes comme l’échinacée, certains lichens ou les champignons comme le shitake ;  la restauration de l’intégrité de la muqueuse intestinale (avec la canneberge ou plus généralement tout fruit rouge ou noir riche en anthocyanes) ; la lutte contre l’infection, avec les huiles essentielles, principalement à thymol et à carvacol ». Il préconise  « une formule à base de thym à thymol, de sarriette, de palmarosa et d’arbre à thé (20 mg de chacune de ces huiles essentielles, dans une gélule gastro-résistante ). Et rappelle, en cas de diarrhées aigües, toutes les vertus du jus de myrtilles, à prendre à raison d’un verre toutes les deux heures.

Il est peut-être aussi possible d’empêcher les contaminations en éliminant les bactéries directement des fruits et légumes. Le professeur Bill Keevil, Chef de service microbiologie et directeur de l’unité Soins de santé environnementale de l’Université de Southampton, a étudié l’effet bactéricide du cuivre sur les bactéries. Le 2 juin dernier, il affirmait que les souches  O104: H4  responsables de l’épidémie allemande  ne survivent pas à une exposition de 45 minutes sur une surface de cuivre humide ! Une propriété qui serait propre au cuivre et à certains alliages à base de laiton et de bronze, également testés…

(1)         Jean Michel Morel – « Traité pratique de phytothérapie » Editions Grancher

(2) Pierre Franchomme-  Daniel Pénoël – « L’aromathérapie exactement » Editions Roger Jollois

 

 Comment éviter la contamination ?

-Lavez bien les légumes, les fruits, les herbes… d’autant plus qu’ils doivent être consommés crus.

-Séparez les aliments crus des aliments cuits ou prêts à être consommés pour éviter les contaminations croisées.

  • Isolez la viande crue.
    -Revenez à une hygiène élémentaire de base (bien se laver les mains)

 

Conserver ses aliments au réfrigérateur  …

Pour éviter les contaminations bactériennes liées à la conservation des aliments, rangez bien vos aliments au réfrigérateur car la température n’y est pas la même partout à l’intérieur.

 

Sur les planches du milieu (4-5°C) et la planche du dessus (8°C), on placera les œufs,   produits laitiers,   charcuterie,   restes,   gâteaux et  produits « à conserver au frais une fois ouvert »

Sur la planche du dessous,   la partie la plus froide du réfrigérateur (2°C) : c’est l’endroit où il faut placer la viande et le poisson frais. Les placer en bas les empêche également de couler sur les autres aliments.

Le bac tout en bas,  est utilisé pour les légumes : sa température peut monter jusqu’à 10°C. Pour les légumes et les fruits qui peuvent être abîmés par des températures plus basses.

Les compartiments ou planches dans la porte qui sont les endroits les plus chauds du réfrigérateur (10-15°C)   sont prévus pour les produits qui ne nécessitent qu’une légère réfrigération (boissons,   sauces et beurre)

 

  • Ne mettez pas trop de nourriture dans votre réfrigérateur : l’air ne peut plus circuler et les températures montent.

  • Dégivrez-le régulièrement  : si vous laissez le givre s’accumuler, le réfrigérateur ne fonctionnera plus efficacement.   Dégivrez votre réfrigérateur   en utilisant de l’eau chaude et un détergent.

  • Ne mettez pas tout au réfrigérateur ! Certains aliments comme les fruits exotiques, les tomates, les haricots verts, les concombres ou les aubergines peuvent être stockés à température ambiante. De même que tous les fruits et   légumes qui ont besoin de mûrir …

  • Vérifiez toujours que la porte est bien fermée.

  • N’ouvrez les portes que lorsque c’est nécessaire et fermez-les dés que possible.

  • Gardez à l’esprit qu’un aliment n’est sûr au réfrigérateur que si c’est conseillé sur l’étiquette.

 

 

 

 

 

Les matrices périnatales de Stanislas Grof

Stanislas Grof est l’un des pères de la psychologie transpersonnelle. Dans les années 60, riches en expérimentation en tout genre, il fût le pionnier de l’utilisation du LSD dans le traitement des patients schizophrènes.  Puis, à la recherche de thérapies plus « naturelles »,  sans recours à des drogues, du développement de la respiration holotropique. Avec le soutien indéfectible de sa femme, Cristina, professeur de yoga. Pour Grof, les dimensions de la psyché humaine sont « infiniment plus vastes que ne le décrivent les manuels de psychologie et de psychiatrie classiques ». Pour bien les comprendre,  doivent être intégrés, outre le modèle classique du psychisme, limité à la biographie postnatale et à l’inconscient individuel au sens freudien, deux autres niveaux « transbiographiques » (et accessibles par la respiration holotropique) : le domaine transpersonnel qui concerne notamment l’identification expérientielle à d’autres personnes et animaux, les expériences karmiques ou l’identification au vide supracosmique… et le domaine périnatal lié au traumatisme de la naissance biologique.

La naissance est, pour chacun,  un événement déterminant   qui va modeler et organiser toutes ses expériences ultérieures.  « Notre manière de nous sentir et de percevoir le monde, ultérieurement dans la vie, est lourdement teintée de ce rappel constant de la vulnérabilité et du sentiment d’inadaptation et de faiblesse que nous avons connus à notre naissance » explique Stanislas Grof. Alors que la psychiatrie classique nie en général la possibilité que la naissance biologique puisse avoir un impact traumatisant sur le psychisme, (à moins bien sûr d’un traumatisme physique réel mettant en souffrance par exemple des cellules cérébrales), l’approche holotropique permet, en s’identifiant au nouveau-né confronté à l’épreuve de sa naissance,  de se connecter à l’universelle lutte de la venue au monde. Tout ce qui survient lors de cet événement, nous l’avons, certes, complètement oubliés. Néanmoins chacune des 4 étapes majeures qui le composent, est associée à des émotions, à des sensations physiques et à des images symboliques bien distinctes… formant des « constellations dynamiques de l’inconscient profond » que Grof désigne sous le nom de Matrices Périnatales Fondamentales (MPF). Ces matrices se comportent aussi comme des principes organisateurs pour des expériences relevant d’autres niveaux de l’inconscient.  L’intérêt de s’y reconnecter ? « À mesure que nous purgeons ces vieux programmes en les laissant émerger à la conscience, ils perdent toute pertinence et d’une certaine manière, meurent » explique-t-il.

MPF1 (union originelle avec la mère)

Correspond à l’univers amniotique, avant l’accouchement

Emotions & sensations physiques : sentiment d’être dans de vastes régions sans frontières ni limites ou (ventre inhospitalier) menace sombre, sentiment d’être empoisonné, sentiment apocalyptique

images symboliques : galaxies, espaces interstellaires, cosmos, océan, animaux aquatiques ou (si perturbé) eaux polluées, décharges toxiques..

 

MPF II (engloutissement cosmique, sans issue – enfer)

Correspond au déclenchement de la naissance biologique (déclenchement)

Emotions & sensations physiques : sentiment d’être menacé d’engloutissement, claustrophobe, anxiété et paranoïa,   pour toujours sans aucun moyen d’en sortir

Identification : prisonniers dans un donjon ou dans un camp de concentration, animal pris au piège

 

MPFIII (la lutte mort-renaissance)

Correspond au passage au travers du canal vaginal

On se sent suffoquer, en danger, menacé..

Emotions & sensations physiques : scènes sataniques et sexuelles, rencontres avec le feu…

Idenitification :  personnages héroïques et divinités représentant mort et renaissance…

 

MPFIV (expérience de mort-renaissance)

Naissance et coupure du cordon ombilical

Emotions & sensations physiques : libération explosive, entrer dans la lumière

Identification : souvenirs très concrets et réalistes (anesthésie, forceps, etc…)

 

 

 

La stevia, nouvel El Dorado des industriels

paru dans Novethic, juin 2011

La stevia a fait son entrée dans le Petit Robert 2012. Sa définition ? « Plante d’Amérique du Sud dont les feuilles ont un fort pouvoir sucrant. Produit extrait de cette plante, utilisé comme édulcorant. » Cela fait bien sûr quelques années que la stevia était dans notre vocabulaire, un peu moins qu’elle est autorisée à entrer dans la composition des aliments et des boissons : déjà plus de 1000 produits en contiennent aujourd’hui, du Pepsi Cola au Breizh Cola en passant par le Chocolat Villars ou les yaourts Nestlé…

Un exemple de « récupération écologique »

C’est de façon un peu abusive que l’on parle de la stevia comme d’un nouvel édulcorant. Il ne s’agit en effet pas de la plante, mais d’un de ses extraits, sur la dizaine qu’elle comporte : le rébaudioside A. Autorisé d’abord aux États-Unis comme additif alimentaire, par la FDA, fin 2008, puis en France, un an après, par l’AFSSA (aujourd’hui ANSES), et en Europe, par l’EFSA (l’Agence Européenne pour la Sécurité des Aliments), au printemps 2010, cet extrait standardisé, également autorisé comme édulcorant de table, est au cœur de toutes les attentions des industriels. Tout est là pour séduire le consommateur du 3e millénaire : acalorique, originaire d’une ethnie exotique — les Indiens guaranis, de la forêt amazonienne —, aisément cultivable et de haut rendement avec ses 4 récoltes annuelles, il se présente comme un édulcorant idéal, sur fond vert d’écologie matinée de commerce équitable et d’agriculture biologique… Au prix de quelques omissions savamment entretenues.

Par exemple, le fait que la plante soit principalement cultivée… en Chine ! 20 000 hectares de terre lui sont consacrés là bas, de quoi récolter plusieurs millions de kilos de feuilles et obtenir quelques milliers de tonnes d’extraits, et assurer près de 80 % de la production mondiale. Historiquement, ce sont des Japonais en visite au Paraguay dans les années 1950 qui l’ont ramenée dans leur pays. La culture s’y est depuis développée et étendue aux autres pays asiatiques (Corée). Le leader mondial de la stevia est d’ailleurs le géant malaisien PureCircle, qui dispose des exploitations agricoles jusqu’aux laboratoires chimiques en permettant l’extraction. PureCircle signe des JointVenture avec Mérisant (qui fabrique l’édulcorant Candérel) ou le sucrier NordZucker, tout en parant sa communication de multinationale des habits de la conscience écologique et humaine : les petits fermiers chinois qui travaillent pour lui seraient bien traités. Au Paraguay et au Brésil, où Pure Circle s’implante depuis les années 2000, les paysans sont aidés et soutenus par des ONG comme Los Amigos de las Americas…

Face à la crise du sucre et à la disgrâce de l’aspartame

Accusé d’être nocif pour la santé, l’aspartame, interdit depuis plus de 40 ans au Japon, est en train d’être réévalué par l’EFSA, qui doit rendre son rapport à la fin 2012. S’il est bien sûr encore trop tôt pour dire s’il sera interdit, il est prévisible qu’il puisse l’être… Notons que l’aspartame ne devrait d’ailleurs même pas être sur le marché européen, ainsi que l’a rappelé très récemment le Réseau Environnement Santé, la Commission Européenne ne disposant même pas des éléments scientifiques (le dossier de toxicologie) exigés pour son autorisation ! Le rébaudioside A se présente comme un concurrent sérieux de l’aspartame, qu’il est en train de supplanter, comme en témoigne l’évolution de ses ventes dans le monde : en 2007, 10 millions de dollars (contre près de 500 millions pour l’aspartame), en 2008, 21millions de dollars. En 2009, 180 millions de dollars. La progression continue, avec l’ouverture des marchés européens début 2010. Fin 2011, le marché de la stevia devrait atteindre 2 milliards de dollars. D’ici 2015, il pourrait en représenter près de 10 soit le quart du marché des édulcorants, estimé à 40 milliards de dollars !
Par ailleurs, les propriétés médicinales antiobésité de la stevia la placent sur un autre marché concurrentiel fortement en crise : le sucre, qui selon le dernier rapport de la Banque Mondiale, Food Price Watch reste toujours un produit rare et cher. Le prix du sucre a ainsi augmenté de 73 % depuis juin 2010. La demande s’accroît avec la démographie tandis que la production sucrière diminue, en raison de l’augmentation de la production des biocarburants à partir de la canne à sucre (notamment au Brésil, premier producteur mondial), mais aussi des mauvaises conditions climatiques (sécheresse…) des pays producteurs. Ce qui élargit bien entendu les débouchés de la stevia. D’autant plus qu’en terme de rendement annuel à l’hectare, pour la canne à sucre (6 à 8 tonnes/ha) c’est 700 à 900 kg de sucre, pour la stevia (3 à 4 tonnes/ha), avec 1 tonne de feuilles de stevia on obtient de 3,6 à 4,5 kg de steviosides, équivalent à 1400 à 1800 kg de de sucre, l’extrait de stevia étant 300 fois plus sucrant que le sucre…

Un succès mondial

Aujourd’hui, de nombreux pays se sont mis à la culture de la stevia : Afrique du Nord, Amérique du Sud, Australie, Canada, États-Unis, Inde, Israël, Russie et, depuis 2010, la France. Un essai dans l’Hérault, autorisé par la DGCCRF, est mené sous la direction de la chambre d’Agriculture de l’Hérault. En agriculture biologique. Si les résultats sont concluants, le développement d’une filière biologique française a toutes les chances de séduire des consommateurs soucieux tant de l’écologie planétaire et du « développement durable »… que de la qualité des extraits ! Car pour l’heure, cette dernière n’est pas contrôlée, comme l’a confirmé la DGCCRF : « Il suffit juste que le laboratoire souscrive au cahier des charges définissant l’extraction chimique du rébaudioside A, avec une exigence de pureté de 97 % ! ». Le seul critère de qualité reste donc pour l’instant la bonne foi des laboratoires. Et, en août 2010, une affaire de stevia bolivienne frelatée, coupée à 20 % à la saccharine, n’a pas été sans semer quelques doutes ! Pour l’heure, le marché mondial de la stevia s’organise : une Organisation Mondiale de la Stevia (WSO) s’est même montée en 2010.
Elle vient d’ailleurs de tenir son 3e Congrès Mondial à Paris, le 25 mai dernier. Cet organisme privé qui réunit des industriels (Coca Cola et Nestlé par exemple) et des universitaires (comme le Pr. Maixent de l’Anses), illustre tout l’engouement que porte le monde des édulcorants à cette nouvelle plante. Tout comme l’enthousiasme mis pour lever les obstacles à son développement : le dernier congrès de la WSO avait pour thème le moyen de neutraliser l’arrière-goût de réglisse de la plante, qui perturbe les consommateurs occidentaux, et a déjà fait renoncer certains industriels, comme les bonbons Ricola par exemple, à l’employer. Sur l’affaire, tous les chimistes sont déjà sur les rangs… Que restera-t-il bientôt de la Stevia naturelle, qui aurait pu faire la richesse des Indiens guaranis, si la convention de Nagoya sur les brevets avait été signée avant ? Une molécule chimiquement parfaite, sans doute….

Le microbiote : des microbes qui nous veulent du bien

Aujourd’hui plus que jamais, la recherche s’intéresse à la population si particulière que représentent les bactéries contenues dans notre tube digestif. Ses mystères commencent à être décryptés. Petit tour d’horizon…

On les regroupait si poétiquement sous l’appellation de flore intestinale. Aujourd’hui, sous la pression des scientifiques américains, c’est désormais de microbiote que l’on parle pour évoquer ces bactéries qui colonisent nos organismes. Ce n’est pas une découverte, cela fait des années qu’elles sont étudiées et que l’on sait à quel point qu’elles participent à notre bon équilibre. Déjà dans les années 1920, on vendait des yaourts en pharmacie pour soigner les diarrhées des bébés ! L’affaire n’est donc pas neuve. Mais les connaissances s’étendent, découvrant le rôle de ce microbiote dans de nombreuses maladies, voire même dans nos comportements psychiques !

Ce microbiote qui nous est propre…

Si le fœtus en est dépourvu, dès sa naissance, le nouveau-né est exposé à toutes les bactéries de son environnement : celles des voies naturelles par lesquelles il doit passer pour venir au monde (s’il naît par césarienne, ou trop prématuré, les choses seront différentes), celles qui se trouvent sur les mains des infirmières, etc. Peu à peu, jusque vers l’âge de 2 ans, les bactéries avec lesquelles le nourrisson est en contact et qui entrent peu à peu dans toutes les cavités de son organisme vont constituer son microbiote personnel, sa carte d’identité bactérienne en quelque sorte. Cette colonisation se fait selon un ordre précis, certains types de bactéries venant en premier, d’autres s’installant bien plus tard. Elle dépend aussi de l’environnement, différent par exemple selon que l’enfant est allaité ou pas. Le microbiote petit à petit devient un monde à part entière et même… 90 % de notre constitution. En effet, des cellules qui nous composent, seules 10 % peuvent être considérées comme d’origine « humaine », les 90 % restants sont des cellules « étrangères », des bactéries plus précisément, auxquelles nous offrons le gite et le couvert. En échange, « nos » bactéries nous aident à digérer les aliments, produisent des vitamines (K, B12, B8), mais aussi combattent les infections (70 % de notre système immunitaire étant associé au tube digestif, le microbiote collabore sans doute grandement avec lui…). Certains chercheurs sont d’ailleurs convaincus que les allergies des enfants sont dues au fait qu’ils n’ont pas été mis en contact avec les bonnes bactéries : selon cette théorie dite « théorie eugéniste » », ils doivent être envoyés en séjour à la ferme pour être exposés aux « bonnes » bactéries, animales et autres, qui sauront les immuniser.   Sans microbiote, nous ne pourrions pas vivre. Impossible ne serait-ce que d’assimiler les végétaux, si nous n’avions pas dans le microbiote des bactéries capables de casser la cellulose, l’amidon et autres polysaccharides qui les constituent ? Mais, alors que l’on pourrait penser que cette flore microbienne est propre à chacun, et qu’il en existe donc autant que d’individus, une chose étonnante vient d’être confirmée par une équipe internationale de chercheurs[1] : le microbiote serait un peu comme le groupe sanguin. Il n’y en aurait en fait qu’un nombre très limité : tout comme il n’y a que 4 types de groupe sanguin, il n’y aurait que 3 types de microbiotes, caractérisés du nom des populations majoritaires de bactéries qui s’y trouvent, à bactéroidètes, à prévotelles ou à ruminocoques… Ces chercheurs ont ainsi, après avoir étudié des microbiotes très similaires, d’une trentaine de Japonais, Français, Espagnols, Danois et Américains, constaté qu’il existait de grandes similitudes entre les flores intestinales des Français et des Japonais par exemple, pourtant soumis à des régimes alimentaires et des environnements très différents. Des résultats dont on ne connaît pas encore bien les implications, car ils doivent être confirmés par l’étude plus large des selles de 250 personnes américaines et danoises.

Microbiote sous influence

Quand bien même on ne discerne que trois types de microbiotes dans le monde, ceux-ci restent influençables. Premier facteur : l’environnement, et plus exactement les bactéries qu’il contient. Grâce à elles, nos microbiotes acquièrent les capacités nécessaires pour mieux digérer. C’est ainsi que l’on explique par exemple pourquoi les japonais digèrent mieux les makis que les Occidentaux : habitués depuis plus longtemps à en manger, ils ont dans leur flore acquis de quoi les digérer. Ainsi, rapporte une étude parue en 2010, la flore intestinale des Japonais contient une bactérie spécifiquement dotée des  gènes permettant de digérer les fibres des algues alimentaires. Comme la « porphyra » (ou « nori ») par exemple qui entre justement dans la composition des makis. Ces gènes, dont sont dépourvues les bactéries des Occidentaux, auraient été transmis aux bactéries intestinales des Japonais par des bactéries marines qui les contenaient naturellement. Hypothèse évoquée : voici mille ans environ, et probablement avec l’introduction du nori dans l’alimentation, les gènes seraient passés, des bactéries marines aux bactéries humaines. Bien d’autres facteurs existent, parmi lesquels on peut citer  le stress : il vient d’être démontré que les patients soumis à un stress présentaient dans leur flore un plus grand nombre de bactéries pathogènes. Ce qui offre quelques nouvelles pistes d’explications au fait que certaines maladies comme le syndrome du côlon irritable ou l’asthme soient particulièrement renforcées  en période de stress. [2]

 

Des maladies expliquées

En étudiant le microbiote (ce qui est possible par l’analyse des  bactéries qui sont contenues dans les selles), les chercheurs ont confirmé que de nombreuses maladies étaient effectivement liées à une dysbiose, autrement dit à un déséquilibre  des populations bactériennes de la flore intestinale. Ainsi, des maladies digestives comme la maladie de Crohn, le syndrome du côlon irritable, les troubles fonctionnels intestinaux ou les maladies inflammatoires de l’intestin ont trouvé un nouvel éclairage. Mais la « dysbiose » serait aussi impliquée dans des pathologies plus inattendues comme dans l’obésité. En cause, un déséquilibre de répartition entre deux grandes populations bactériennes : les obèses ont ainsi plus de firmicutes que de bactéroidètes. « Des études ont montré que lorsqu’une personne obèse maigrit, son microbiote se met à ressembler à celui d’une personne mince ! » poursuit Gérard Corthier, ancien directeur de l’unité Inra d’Écologie et de Physiologie digestive [3]. Leur population de bactéroidètes se met à augmenter. Autre implication possible du microbiote : les maladies auto-immunes telles que le diabète de type I.  Et même certains troubles du comportement alimentaire. « Si l’on prend des souris sans microbiote (sous bulle) et que l’on rajoute diverses microflores humaines, on observe que sur des tests de comportement (test de peur dans un labyrinthe par exemple), elles n’ont pas le même comportement en fonction de leur microbiote », poursuit-il. En extrapolant, et « même si cela n’excusera pas les grands criminels, est-ce qu’une partie de notre comportement ne pourrait pas être liée aux bactéries qui nous habitent ? » s’interroge Gérard Corthier. Certaines formes d’autisme semblent d’ailleurs déjà pouvoir être grandement améliorées… par la prise d’antibiotiques !

 

Pré et Probiotiques….

Toutes ces découvertes confortent l’idée qu’en agissant sur la flore intestinale, on agit aussi sur la santé. Depuis longtemps, les autorités sanitaires reconnaissent d’ailleurs l’intérêt des prébiotiques, des ingrédients alimentaires non digestibles qui stimulent la multiplication et l’activité de certaines bactéries intestinales, les bifides (effet « bifidogène »), tels que les Fructo-Oligo-Saccharides (FOS) ou l’Inuline, extraite de la chicorée, ainsi que celui des probiotiques, des bactéries d’origine naturelle, comme les lactobacilles par exemple, que l’on trouve dans la choucroute, les laits fermentés… et bien sûr dans les yaourts ! Dans un monde où les allégations de santé sont soumises à l’exigence des preuves, et sont sous le feu des législateurs, il n’est pas étonnant que la plupart des recherches menées dans ce domaine intéressent avant tout…les grandes industries de produits laitiers comme Danone ou Nestlé, par exemple, qui, avec leur « bifidus actif », participe au financement, de programmes menés à l’INRA (Institut National de la Recherche Agronomique) par exemple. Heureusement, la question des conflits d’intérêts se trouve atténuée par le fait qu’il n’y a pas de dangers à taire, les bactéries sont ici là pour nous servir : plus belle peau, meilleure immunité, et amélioration des troubles fonctionnels intestinaux en sont ainsi les principaux bénéfices revendiqués ! À noter enfin qu’il existe aussi des symbiotiques, qui allient à des souches probiotiques à une matrice prébiotique pour une action plus totale.

 

Vous avez dit dysbiose ?

La flore intestinale peut être momentanément perturbée, on le sait depuis longtemps, par la prise d’antibiotiques par exemple. Ou par le lavage au PEG (polyéthylèneglycol) précédant une coloscopie. Ou bien encore par le lavement à l’eau lors d’une hydrothérapie du côlon. Mais elle finit toujours par se reconstituer, au bout d’un certain temps plus ou moins long. En cas de dysbiose avérée, la recherche d’intolérances alimentaires, suivie des corrections diététiques qui s’imposent est une première étape. Elle peut être complétée par la prescription de traitements naturels à base d’huile essentielle de cannelle (qui assainit la lumière intestinale), de curcuma (qui apaise l’inflammation de la muqueuse intestinale), de chlorophylle magnésienne pure (qui cicatrise la muqueuse altérée) et de divers nutriments spécifiques (comme la L-glutamine) [4].…. En attendant que l’on puisse agir directement sur la flore intestinale, ce qui pourra sans doute être possible un jour, avec des bactéries soigneusement choisies. Mais pour l’instant, les chercheurs sont encore en phase d’exploration et n’ambitionnent apparemment pas du tout de jouer aux apprentis sorciers. L’un d’entre eux, Jeffrey Gordon, celui-là même qui a mis en évidence les différences de microbiotes entre personnes obèses et saines a même déclaré : « il est urgent d’attendre ! »   Une prudence d’autant plus salutaire que si l’on s’intéresse aux bactéries d’origine naturelle, il est désormais aussi possible de créer des bactéries de toutes pièces et avec tous les gènes que l’on veut, de nouveaux OGM en somme !

 Les antibiotiques diminuent-ils notre immununité ? Les antibiotiques ne perturbent  pas seulement notre flore en y semant la diarrhée : une expérience menée chez les souris a montré que celles qui prenaient des antibiotiques se défendaient moins bien contre le virus de la grippe que celles qui n’en prennent pas. Comme si les antibiotiques « tuaient » aussi les bactéries qui permettent notre immunité….[5]

Des microbes dans tout le corps !

Le microbiote ne se limite pas à notre tube digestif : toutes les cavités du corps (bouche, vagin, système urinaire) sont colonisées par les bactéries et des pathologies sont directement liées à la multiplication incontrôlée de certaines d’entre elles : Escherischia Coli, responsable des gastro-entérites mais aussi des cystites, d’un streptocoque qui dans la cavité buccale favorise l’apparition des caries ou d’autres micro-organismes comme Candida Albicans, une levure ayant évolué en moisissure, capable de coloniser tout le tube digestif et même plus, puisqu’elle est impliquée dans des mycoses vaginales ou le muguet du nouveau-né. (voir le numéro d’Alternative Santé de février 2010)

 

 Intolérance alimentaire et réaction inflammatoire de l’intestin

L’intolérance digestive au blé et à ses protéines entraîne des fermentations et des putréfactions intestinales qui modifient la perméabilité intestinale. Déréglée, la muqueuse intestinale s’inflamme, et laisse passer les grosses molécules comme le gluten, qui se transforme en glutéomorphine, interagissant avec les récepteurs morphiniques du système nerveux central. D’où, chez les intolérants au gluten, des troubles du comportement qui viennent se surajouter aux symptômes intestinaux…. Si l’intolérance au gluten est bien définie, la plupart des intolérances alimentaires semblent en revanche loin d’être réductibles à une simple analyse sanguine visant à rechercher les différents types d’immunoglobulines (IgG , IgE, etc…) : les personnes allergiques au lait de vache peuvent avoir des IgG positifs, des IgE positifs ou rien du tout ! rappelle le docteur Éric Ménat. Les tests, disponibles sur internet, sont onéreux (jusqu’à 400 euros) et d’efficacité douteuse, comme envisage de le dénoncer prochainement la SFA (société française d’allergologie).

 

 



[1] Manimozhiyan A et al – « Enterotypes of the human gut microbiome »  Nature, 472 (7343) (21 avril 2011)

 

 

[2] Bailey MT « Exposure to  a social stressor alters the structure of the intestinal microbiota : implication for stressor-induced immunomodulation » Brain, Behavior and Immunity 25 (3), (03/2011)

 

[3] Gérard Corthier – « Bonnes bactéries et bonne santé », 128 pages, éditions Quae, 2011 (disponible auprès de Editions Quae, c/o Inra, RD 10, 78026 Versailles Cedex, France)

[4] Communication du Dr Eric Ménat lors des 27èmes Rencontres des Médecines Alternatives et Complémentaires à l’hôpital Tenon en 2010, dont le thème était  « L’intestin, carrefour stratégique de la santé »

[5] Cité dans Science 179(8) du 09/04/2011


Vers une « médecine environnementale » ?

Les 12 et 13 avril dernier, l’ARTAC  [1] organisait son troisième colloque international, avec des médecins et scientifiques du monde entier, autour du thème « la Santé des Enfants et de l’Environnement ». L’amorce d’une reconnaissance officielle des travaux visant à relier l’environnement et la santé ?

Genon Kensen de l’Alliance pour la Santé et l’Environnement, un réseau européen d’ONG qui vise à améliorer la santé grâce à des politiques publiques qui promeuvent un environnement plus propre et plus sûr, ne mâche pas ses mots : « l’exposition quotidienne à des produits chimiques “industriels” peut être nocive pour la santé. Les effets sur les enfants peuvent être le résultat d’une exposition maternelle avant et pendant la grossesse et après la naissance. » Dans la droite ligne de l’Appel de Paris, un manifeste lancé en 2004 par un groupe d’experts internationaux, les scientifiques continuent d’affirmer qu’un grand nombre des maladies actuelles sont causées par la dégradation de l’environnement…

Des maladies chroniques de plus en plus préoccupantes

Signe des temps, le colloque de l’ARTAC était soutenu, pour la première fois, par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé). L’OMS vient d’ailleurs de reconnaître, dans un communique du 27 avril dernier, que « les maladies chroniques telles que le cancer, les maladies cardiovasculaires ou le diabète ont atteint des proportions épidémiques bien plus préoccupantes que les maladies infectieuses ». Un constat que confortent les statistiques françaises selon les données des assurances : « Un français sur sept est aujourd’hui en ALD (Affection Longue Durée), rappelle le professeur Belpomme, fondateur d’ARTAC. “Or on sait que ces maladies peuvent être liées à des causes environnementales…» C’est le cas de nombreux cancers par exemple, cela ne fait plus de doutes. Des cancers qui frappent de plus en plus tôt, de 2 à 3 % plus d’enfants qu’il y a 30 ans. C’est aussi le cas de bien d’autres maladies. La liste des maladies pour lesquelles l’environnement est au banc des accusés s’est étendue depuis à l’obésité, au diabète ou à l’asthme… « On note aussi que de plus en plus de sujets jeunes sont atteints de maladies d’Alzheimer » complète le professeur Belpomme. « Et l’on assiste à une véritable épidémie d’autisme »… Mais alors que les scientifiques ont toujours eu tendance à rechercher des facteurs déclencheurs immédiats et directs à ces maladies, de nouvelles pistes de compréhension vont probablement générer une nouvelle façon d’approcher la question. En effet, développement de l’épigénétique aidant (voir notre numéro de mars 2011), on sait aujourd’hui que tout commence probablement bien avant la naissance : comme l’a expliqué le pédiatre italien Ernesto Burgio, qui étudie l’origine embryo — fœtale des maladies de l’adulte « nos propres phénotypes physiologiques et pathologiques sont largement déterminés par l’induction/modulation de marqueurs épigénétiques de nos cellules et tissus par des facteurs environnementaux ». En d’autres mots, les facteurs environnementaux auxquels est exposé un fœtus vont le « programmer » à développer plus tard telle ou telle maladie. Dans cette conception, une maladie peut être « un résultat tardif chez l’adulte d’un processus de développement qui a mal tourné, profondément enraciné dès les premiers stades de développement et du fœtus. » L’exemple des petits-enfants de mamans ayant pris du distilbène montre en outre un impact transgénérationnel qui va plus loin que la simple exposition du fœtus à un polluant. Raison de plus pour faire attention aux générations futures !

Sous la pression des lobbys industriels…

Pour autant, malgré les connaissances qui s’accumulent, peu de mesures ont été prises pour lutter efficacement contre les pollutions chimiques ! Même si les liens ne sont pas toujours faciles à prouver… « Il est particulièrement difficile d’établir de manière irréfutable l’impact sur la santé des polluants environnementaux », explique le Pr. Hanns Moshammer, chercheur spécialisé en épidémiologie, qui faisait l’ouverture du colloque de l’ARTAC. La société civile a ici un rôle essentiel à jouer. Surtout dans notre société, où, a-t-il rappelé, « on a tendance à transformer les victimes en coupables ! » Ana Soto, professeur de biologie cellulaire à Boston, et spécialiste des perturbateurs endocriniens, a pour sa part rappelé comment l’histoire du bisphénol A était un triste cas d’école : bien que le Congrès américain ait voté dès 1993 un droit à une eau et à une alimentation sans perturbateurs endocriniens, le bisphénol A a continué d’être autorisé – maintien des intérêts économiques des industriels du plastique oblige – bon an mal an, son côté perturbateur étant régulièrement contesté, jusqu’en 2009  aux États-Unis ! Car pour chaque polluant, c’est le même scénario : lorsque l’effet pathogène d’un produit est démontré par une étude scientifique, le lobby du produit en question s’empresse d’aller financer un laboratoire pour démontrer qu’il n’y a pas tant d’effets que cela, et donc que l’étude montrant sa toxicité n’est pas valide ! Comme les études scientifiques coûtent chers à réaliser, ce sont bien souvent ceux qui ont le plus d’argent à y consacrer qui les orientent… Un procédé que la mention seule des conflits d’intérêts éventuels ne suffit pas à enrayer. Et qui sème le doute chez les politiques au point de freiner la prise de décisions ! En France, le statut du bisphénol A est ainsi suspendu jusqu’à la fin de l’année, les politiques préférant attendre les résultats de l’expertise de l’INSERM que de suivre les associations qui souhaitent élargir l’interdiction actuelle dans les biberons à tous les plastiques alimentaires…

Bien d’autres problèmes posant toujours des questions sanitaires ont été exposés au cours de ce colloque. Les champs électromagnétiques par exemple, qui faisaient l’objet d’une table ronde spécifique, au cours de laquelle il a été rappelé que l’exposition aux champs magnétiques engendrés par les lignes électriques de haute et de très haute tension accroit le risque de leucémies infantiles et, comme l’a souligné le professeur Franz Adlkofer, coordonnateur du programme de recherche REFLEX financé par la communauté européenne et portant  sur les  effets biologiques des champs électromagnétiques, qu’ « il est fortement probable que le risque de développer une tumeur cérébrale chez l’enfant à cause de la téléphonie mobile soit une réalité ». Si les mesures officielles récentes (périmètre de sécurité, démontage des antennes relais existant sur les établissements scolaires, interdiction de l’utilisation des téléphones portables pour les moins de 6 ans ainsi que dans les écoles…) témoignent d’une prise de conscience dans ce sens, elles doivent encore être étendues. Le professeur Lennhardt Hardell, professeur suédois en onconlogie médicale, a exposé les risques similaires liés à l’utilisation…de simples téléphones DECT, les téléphones sans fil que l’on trouve partout aujourd’hui. Enfin, actualité oblige, le scandale  actuel du nucléaire a été aussi dénoncé. Et en premier lieu, comme l’a rappelé Paul Lannoye, député vert européen, que l’OMS est liée par un accord à l’AIEA, l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (le lobby du nucléaire, donc), qui lui interdit d’aborder la question des effets du nucléaire sur la santé. Si cet accord n’existait pas, l’OMS aurait été dans l’obligation de faire son travail, c’est-à-dire un bilan sanitaire en Biélorussie par exemple des conséquences de Tchernobyl… Le colloque était dédié à la mémoire du professeur Lorenzo Tomatis, mis en 1993 à la porte de l’IARC (centre international de recherche sur le cancer) qu’il présidait pourtant depuis 1982. Il avait dénoncé les conflits d’intérêt en jeu dans les études scientifiques sur lesquelles s’appuyait l’IARC pour établir la liste des différents produits chimiques cancérogènes probables, présumés ou avérés. Aujourd’hui, les scientifiques qui lancent des cris d’alarme se font probablement mieux entendre. Sauront-ils pour autant convaincre les pouvoirs publics, comme le souhaite le professeur Belpomme, « d’inclure enfin la santé dans le principe de précaution » ? Car ce principe ne concerne pour l’instant… que l’Environnement !


[1] L’ARTAC (Association pour la Recherche Thérapeutique Anti-Cancéreuse) est un organisme de recherche indépendant, privé à but non lucratif, fondé en 2004. A l’origine de l’appel de Paris et de la mise au point de plusieurs médicaments anticancéreux,   l’ARTAC travaille aussi  sur la prévention.